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Quand l’après de la mort garde à mes molécules
Ce grand destin, sied-il de mourir morfondu ?
Bon pour qui ne fera qu’un sec et long pendu
Dans l’air suave du Seigneur, au crépuscule.

Mais moi j’attends sans peur le beau voyage blanc,
Où paravant d’être dissous en perle, ou squale,
Je fuirai sur la vague agile et musicale
La terre dure où l’on ne sent pas battre un flanc.

La mer me roulera sur son ventre élastique
Que fouette, verte ou blanche, ou jaune, sa toison,
Et qui, mieux que la terre en ses lentes saisons,
N’a pas besoin d’un an pour changer de tunique.

Pour me voir, ses anciens amants, les Noyés blets,
D’yeux fondus, de phlegmons qui font l’orbite en ove,
D’une bouche tordue où l’anguille se love,
Ocelleront les verrières de ses palais ;

Colleront aux hublots du goufre de haineuses
Faces d’enfant vénal et bouffi, de mignons
Mous et vidés, jaloux du nouveau compagnon
Qu’à son tour va mûrir la couche vénéneuse.

Oh ! d’un spasme crever ces flancs répudiés !
En hurlant régner sa minute inassouvie !
Et vous fouillant-la bouche, et vous lappant la vie,
Ces langues de la vague obscène, par milliers !