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Au contact de cette main, Firmin éprouva un éblouissement et comme une ivresse des sens. Il la pressa avec frénésie en la portant à ses lèvres, brûlantes comme le feu.

— Madeleine, Madeleine, dit-il, je ne puis pas, je ne veux plus partir !…

— Êtes-vous donc fou, monsieur Claudien ? murmura la jeune fille en retirant vivement sa main et en reculant d’un pas.

— Ah ! Madeleine, s’écria Firmin, vous m’aimez, vous savez tout mon amour pour vous, et vous n’avez pas compris que Claudien, c’était moi…

M. de Lansac !

— Silence ! ou nous sommes perdus…

Madeleine s’était collée contre la muraille, où l’on eût dit qu’elle voulait s’enfoncer, les mains tremblantes, les lèvres entr’ouvertes et blanches comme les lèvres d’une morte. À travers la faible lueur que projetaient sur cette scène les rayons vacillants de la chandelle, Firmin vit la décomposition du visage de Madeleine.

— Mon Dieu ! que va-t-il arriver ? pensa-t-il.

Prenant alors l’une des mains glacées de la jeune fille :

— Madeleine, dit-il d’une voix caressante, vous souffrez…

Madeleine ne répondit point. Firmin, qui avait pris la lumière prête à s’échapper de ses doigts, la rapprocha de son visage et fut effrayé de la pâleur de la pauvre enfant. Il suivit de plus près et avec une mortelle inquiétude les émotions qui se traduisaient dans tous les traits de Madeleine. Il vit tout à coup des larmes humecter ses yeux, puis s’échapper en abondance.

— Oh ! fuyez, fuyez… monsieur le comte, dit-elle alors d’une voix coupée par les sanglots. C’est bien mal, ce que vous avez fait là…