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III


Celui qui parlait ainsi était un homme d’une cinquantaine d’années. Son teint cuivré, ses cheveux plats, lisses et grisonnants à peine, ses yeux noirs, vifs et doux en même temps, entourés d’un cercle bistré, ses dents blanches comme du lait, enchâssées dans des gencives plutôt violettes que rouges, étaient les indices certains de son origine indienne.

José, ainsi il se nommait, était en effet un des descendants de la race primitive du pays, dont les débris ramassés dans la plaine de Santiago, au pied des montagnes, occupent le pueblo de Caney, — à peine un coin de cette vaste île dont ils furent jadis les possesseurs.

Ces épaves d’une race, détruite aujourd’hui, n’ont jamais connu l’esclavage. Les Indiens ont conservé, après leur dispersion et leur soumission, leurs anciens priviléges. Mais cette liberté qu’ils ont sauvée du naufrage consiste à vivre dans une dégradante fainéantise. Quelques-uns d’entre eux, — et c’est une exception, — ont pris cependant à la civilisation qui les entoure l’amour et le besoin du travail. Ce fut particulièrement au moment de