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en Chine qu’ailleurs d’éteindre complètement le paupérisme. Nous savons que, dans tous les grands centres de population, il y aura malheureusement toujours beaucoup de pauvres, et que la classe des nécessiteux de tout genre y sera très-considérable. Mais on pourrait en diminuer le nombre, au lieu que nous avons remarqué, durant notre séjour en Chine, qu’il allait tous les ans en augmentant ; et c’est ce qui explique peut-être l’étonnante facilité et les développements prodigieux de l’insurrection formidable qui menace en ce moment de bouleverser de fond en comble cet empire colossal.

À toutes les époques, et dans les pays les plus florissants et les mieux gouvernés, il y a toujours eu et il y aura toujours des pauvres ; mais nulle part, sans contredit, il ne s’est jamais vu une misère profonde et désastreuse comme dans l’Empire Céleste. Il n’est pas d’année où, tantôt sur un point et tantôt sur un autre, il ne meure de faim ou de froid une multitude effrayante d’individus. Le nombre de ceux qui vivent au jour le jour est incalculable. Qu’une inondation, une sécheresse, un accident quelconque, vienne à compromettre la récolte dans une seule province, et voilà les deux tiers de la population livrés immédiatement à toutes les horreurs de la famine. On voit alors se former de grandes bandes, comme des armées de mendiants, qui s’en vont tous ensemble, hommes, femmes et enfants, chercher, dans les villes et dans les villages, un peu de nourriture, de quoi soutenir encore quelques instants leur misérable existence. Plusieurs d’entre eux tombent d’inanition et meurent avant d’arriver au lieu où ils espéraient trouver quelque secours. On voit leurs cadavres