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Ce respectable magistrat n’avait pas la finesse d’esprit ni les manières distinguées de son jeune confrère de I-tou-hien ; mais il nous parut doué d’une grande pénétration. Il causait avec agrément, et l’élégance des formes se trouvait compensée chez lui par un ton de franchise et de bonhomie qui convenait merveilleusement à son âge avancé. Nous apprîmes de son sse-yé ou conseiller intime qu’il était issu d’une pauvre famille de cultivateurs. Sa jeunesse avait été laborieuse et remplie de privations ; il avait subi les examens littéraires avec tant de distinction, que, malgré son obscurité, et quoiqu’il n’eût personne pour le protéger, il obtint dans sa province le grade de bachelier, et, plus tard, à Péking, celui de docteur. Ensuite il avait gravi péniblement les degrés inférieurs de la magistrature, et, à force de mérite, il était enfin arrivé à la charge de préfet dans une ville de troisième ordre. Pour parvenir aux dignités supérieures, il fallait faire des dépenses considérables, offrir des cadeaux très-coûteux aux personnages les plus influents de la cour et aux ministres. Il ne pouvait donc prétendre à un emploi plus élevé, parce qu’il était pauvre, et il était pauvre parce qu’il ne pressurait pas ses administrés, parce qu’il leur rendait la justice gratuitement et qu’il partageait son modique traitement avec les indigents de son district ; aussi chacun l’aimait et bénissait son administration.

Dès que nous fûmes installés dans le palais communal, nous remarquâmes que le peuple entrait librement partout, envahissant les cours, les jardins et les appartements, pénétrant même, sans se gêner, dans la salle où nous étions à causer avec le préfet. Maître