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ques seuls sachent se suffire à eux-mêmes. Ces Européens, si dédaigneux, si enorgueillis des progrès qu’ils ont faits dans les arts et dans les sciences depuis trois cents ans, sont continuellement à s’informer comment pensent, raisonnent et sentent des hommes qu’ils regardent comme leur étant fort inférieurs sous tous les rapports ; et ceux-ci ne s’inquiètent pas si les Européens raisonnent, ou même s’ils existent. On s’adonne à la littérature orientale à Paris et à Londres, et l’on ne sait, à Téhéran ou à Péking, s’il y a au monde une littérature occidentale. Les Asiatiques ne songent pas à nous contester notre supériorité intellectuelle ; ils l’ignorent et ne s’en embarrassent pas, ce qui est incomparablement plus mortifiant pour des hommes si occupés à s’en targuer et si disposés à s’en prévaloir. »

En Europe, en France surtout et en Angleterre, on semble porter, depuis quelques années, un vif intérêt à tout ce qui se passe dans le Céleste Empire. Tout ce qui vient de ce pays pique la curiosité, et on cherche de toute manière à connaître ces originaux qui veulent absolument vivre à part dans le monde. Or, il nous semble qu’on doit, avant tout, rechercher la cause de la bizarre existence de ce peuple dans l’excentricité de sa langue. C’est surtout en parlant des Chinois qu’il est vrai de dire que la littérature est l’expression de la société.

Ce qui distingue la langue chinoise de toutes les autres, c’est son originalité surprenante, sa grande antiquité, son immutabilité, et surtout sa prodigieuse extension dans les contrées les plus peuplées de l’Asie.