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l’accompagnent impitoyablement jusqu’à la tombe. D’abord sa naissance est, en général, regardée comme une humiliation et un déshonneur pour la famille ; c’est une preuve évidente de la malédiction du ciel. Si elle n’est pas immédiatement étouffée, selon un usage atroce dont nous parlerons plus loin, elle est considérée et traitée comme un être d’une condition radicalement méprisable et appartenant à peine à l’espèce humaine. Cette idée paraît si incontestable, que Pan-houi-pan, femme célèbre parmi les écrivains chinois, s’applique, dans ses ouvrages, à humilier son sexe, en lui rappelant sans cesse le rang inférieur qu’il occupe dans la création : Quand un fils est né, dit-elle, il dort sur un lit, il est vêtu de robes et joue avec des perles ; chacun obéit à ses cris de prince. Mais, quand une fille est née, elle dort sur la terre, couverte d’un simple drap ; elle joue avec une tuile ; elle est incapable ou de bien ou de mal ; elle ne doit songer qu’à préparer le vin et la nourriture, et à ne point chagriner ses parents. »

Dans les temps anciens, au lieu de se réjouir quand naissait une enfant du sexe inférieur, on la laissait pendant trois jours entiers par terre, sur quelque pauvre tas de chiffons, et la famille ne témoignait, en aucune façon, qu’elle prît la moindre part à cet événement insignifiant. Ce temps expiré, on accomplissait à peine quelques cérémonies futiles, qui contrastaient avec les réjouissances solennelles auxquelles donne lieu la naissance d’un enfant mâle. Pan-houi-pan, qui rappelle cette ancienne coutume, en vante la sagesse et la convenance, parce qu’elle prépare la femme au juste sentiment de son infériorité.