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La séance était ouverte. Nous plaçâmes devant nous, sur la table, le corps du délit, c’est-à-dire la lettre et le petit paquet. Après avoir lu et commenté la lettre, nous la fîmes passer au mandarin militaire de Tchoung-king qui se trouvait à la dernière place à droite, et nous lui demandâmes si c’était bien là la lettre qu’il avait décachetée, s’il la reconnaissait. La réponse fut affirmative. Nous lui fîmes ensuite passer le paquet qui renfermait des fruits secs et quelques colliers parfumés au girofle et au sandal. Son identité ayant été constatée, nous chargeâmes une sorte d’huissier, coiffé d’un bonnet de feutre noir en forme de pain de sucre et orné de longues plumes de faisan, de présenter la lettre et le paquet à chacun des juges, afin que le tribunal pût bien former sa conscience et se prononcer en parfaite connaissance de cause.

Ces préliminaires étant terminés, l’ordre fut donné d’aller chercher l’accusé et de l’introduire à la barre. Bientôt nous vîmes s’avancer, entre quatre satellites de mauvaise mine, un Chinois aux manières élégantes et d’une physionomie pleine d’intelligence. Un chapelet, au bout duquel brillait une grande croix de cuivre, était passé à son cou en guise de collier. En voyant l’accusé, nous espérâmes que le procès marcherait avec succès. On comprend combien il eût été embarrassant et peu agréable d’avoir affaire à un homme timide, borné, incapable, en un mot, de nous soutenir dans la position singulière où nous nous trouvions ; mais il était impossible de mieux rencontrer. Le chef de la famille Tchao nous parut taillé tout exprès pour la circonstance.

Dès qu’il fut arrivé au bas de l’estrade, il jeta sur la