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quée par un accident bizarre, fantastique, et dont le récit pourra ressembler un peu à un conte de revenant. Nous déclarons donc, par avance, que ce n’est pas un conte et que nous n’avons été le jouet d’aucune hallucination. Nous étions dans notre chambre, dormant d’un sommeil profond, lorsqu’il nous sembla entendre, comme dans un rêve, un bruit sonore et cadencé qui se promenait, par intervalles, dans les cours, dans les jardins et dans les divers appartements du palais communal. Ce bruit paraissait tantôt venir de fort loin et tantôt être dans notre chambre. Il nous semblait aussi entendre sur les nattes de bambou de légers craquements comme les pas de quelqu’un qui marche avec précaution pour ne pas être entendu ; quelquefois nous étions comme au milieu d’une grande illumination, puis les ténèbres revenaient tout à coup, et une voix, qui se penchait à notre oreille, articulait quelques mots dont nous ne pouvions comprendre le sens, et le bruit sonore et cadencé s’éloignait de nouveau pour se rapprocher encore. Nous étions toujours profondément endormis, et pourtant nous avions le sentiment qu’un cauchemar nous tenait oppressés ; car, malgré tous nos efforts, il nous était impossible de nous remuer, d’ouvrir les yeux, ni de proférer une parole. Enfin nous sentîmes comme un coup sur l’épaule, et, après une violente secousse qui nous réveilla en sursaut, nous nous trouvâmes environnés d’une lumière éblouissante et en face d’une figure hideuse, qui se mit à rire et nous montra ses dents longues et jaunies. Le spectre allongea son bras nu et décharné, et nous présenta d’un air grave un papier écrit en caractères européens. Nous fîmes instinctivement un