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quatre porteurs, et le rusé conducteur avait combiné les choses de manière à n’en mettre que trois seulement, deux devant et un derrière ; de cette façon il économisait à son profit le salaire de deux porteurs. Une pareille tricherie n’avait pas trop de quoi nous surprendre ; nous savions depuis longtemps que les Chinois ne sont pas de force à suivre invariablement la ligne droite, et qu’on est souvent forcé de les y ramener ; mais, dès le premier jour, commencer ainsi à aller tout de travers, ce n’était pas de bon augure.

Sur le soir, comme nous prenions le thé en commun, nous dîmes à notre conducteur que nous avions arrêté un projet pour le lendemain. — Oh ! je comprends, je devine, dit-il avec l’air satisfait d’un homme qui se croit une grande sagacité, vous n’aimez pas la chaleur, et vous désirez partir demain de bonne heure, afin de jouir de la fraîcheur du matin ; n’est-ce pas que c’est cela ? — Pas le moins du monde. Demain tu partiras seul et lu retourneras à Tching-tou-fou. — Est-ce que, par hasard, vous auriez oublié quelque chose d’important ? — Nous n’avons rien oublié. Tu retourneras, avons-nous dit, à Tching-tou-fou ; tu iras trouver le vice-roi et tu lui annonceras que nous ne voulons plus de toi. Nous prononçâmes ces paroles d’une manière si sérieuse, que maître Ting ne pouvait assurément avoir la pensée de les prendre pour une plaisanterie. Il se leva brusquement et se mit à nous contempler bouche béante, et d’un air stupéfait. Nous continuâmes : Tu diras donc au vice-roi que nous ne voulons plus de toi et que nous le prions de nous envoyer un autre conducteur ; et, si le vice-roi te demande pourquoi nous ne voulons plus de toi, tu pour-