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Chine dans ces malheureux temps, et voici ce qu’il écrivait, en 1722, à monseigneur de Nesmond, archevêque de Toulouse : « Il n’y a que peu de mois que je suis arrivé à la Chine, et, en y arrivant, j’ai été infiniment touché de voir le triste état où se trouve une mission qui donnait, il n’y a pas longtemps, de si belles espérances. Des églises ruinées, des chrétientés dispersées, des missionnaires exilés et confinés à Canton, premier port de la Chine, sans qu’il leur soit permis de pénétrer plus avant dans l’empire, enfin, la religion sur le point d’être proscrite : voilà, Monseigneur, les tristes objets qui se sont présentés à mes yeux à mon entrée dans un empire où l’on trouvait de si favorables dispositions à se soumettre à l’Évangile. »

Les tristes prévisions du P. Gaubil ne tardèrent pas à se réaliser. Deux ans plus tard, le P. de Mailla, écrivant en France à un de ses confrères, lui disait : Comment vous écrire, dans l’accablement où nous sommes, et le moyen de vous faire le détail des tristes scènes qui se sont passées sous nos yeux ? Ce que nous appréhendions depuis plusieurs années, ce que nous avions tant de fois prédit, vient enfin d’arriver : notre sainte religion est entièrement proscrite à la Chine ; tous les missionnaires, à la réserve de ceux qui étaient à Péking[1], sont chassés de l’empire ; les églises sont ou démolies, ou destinées à des usages profanes ; des édits se publient où, sous des peines rigoureuses, on ordonne aux chrétiens de renoncer à la foi et où l’on défend aux

  1. Les missionnaires auxquels il fut permis de rester à Péking appartenaient au bureau des mathématiques, ou étaient employés à la cour à titre d’artistes et de savants.