Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

joug de cette supériorité d’esprit auquel on ne se soumet volontiers que quand on le reçoit sans s’en apercevoir. Il fallait enfin une aussi grande vertu et une aussi continuelle union avec Dieu que celles de l’homme apostolique, pour se rendre supportables à soi-même, par l’onction de l’esprit intérieur, les travaux d’une vie aussi pénible, aussi pleine de dangers que celle qu’il avait menée depuis qu’il était en Chine, où l’on peut dire que le plus long martyre lui aurait épargné bien des souffrances[1].

Après plus de vingt ans de travaux et de patience, le P. Ricci n’avait guère recueilli que des persécutions cruelles ou des applaudissements stériles. Mais, quand il eut été reçu favorablement à la cour, les conversions furent nombreuses, et l’on vit s’élever sur plusieurs points des églises catholiques. Le P. Ricci mourut en 1610, à l’âge de cinquante-huit ans. Il eut la consolation de laisser la mission, devenue enfin florissante, à des missionnaires animés de son zèle, et qui, appelant comme lui au secours de leurs prédications les arts et les sciences, continuèrent à piquer la curiosité des Chinois et à se les rendre favorables. Les plus illustres d’entre eux furent les PP. Adam Schals et Verbiest. C’est à ce dernier que les Français sont redevables de leur entrée en Chine ; c’est lui qui les fit venir à Péking, qui disposa l’empereur à les recevoir et à les traiter avec distinction. Ce fut seulement vers la fin de l’année 1684 qu’on songea, en France, à envoyer des missionnaires à la Chine. On travaillait alors, par ordre du roi, à réformer la

  1. Préface des Lettres édifiantes, t. III. p. 5.