Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/178

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tombeaux, le vice-roi parut saisi d’étonnement… Les missionnaires français possédaient aux environs de Péking un magnifique enclos, qui leur avait été donné par l’empereur Khang-hi, pour en faire le lieu de leur sépulture. C’est là que reposent un grand nombre de nos compatriotes, morts à neuf mille lieues de leur patrie, après avoir usé leur vie dans les souffrances et les privations, au milieu d’un peuple qui ne sut jamais apprécier ni leur vertu ni leur science. Nous avons plusieurs fois visité cet enclos, connu des Chinois sous le nom de Sépulture française. En y entrant, on sent son cœur battre d’émotion comme si on allait mettre le pied sur le sol de la patrie. Cette terre est, en effet, bien française ; c’est comme une touchante et précieuse colonie, conquise au milieu de l’empire chinois par les ossements de nos frères. Le site est un des plus beaux qu’on puisse trouver aux environs de Péking. Les murs de clôture sont assez bien conservés ; mais la maison et la charpente, dont la construction est d’un style moitié européen et moitié chinois, auraient besoin de grandes réparations. Au milieu d’un vaste jardin, aujourd’hui inculte, on remarque un bosquet où les tombeaux des missionnaires sont rangés par ordre sous des arbres de haute futaie. Depuis que les Européens n’ont plus en Chine une existence légale, la Sépulture française avait été confiée à la garde d’une famille chrétienne qui a été envoyée en exil à la suite d’une récente persécution. L’établissement fut saccagé et pillé par les bandits de Péking. Actuellement le gouvernement s’en est emparé, et les païens qu’on y a logés volent journellement tout ce qui est à leur convenance, les arbres, les matériaux