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pathétique ; il nous conjura d’attendre encore avant de lui arracher le cœur. Nous dûmes, de notre côté, lui exprimer vivement la douleur où nous serions plongés, quand nous nous trouverions séparés de lui par les lacs, les fleuves, les plaines et les montagnes. Cependant, malgré ce besoin mutuel de vivre toujours ensemble, il fut décidé que nous partirions dans deux jours.

Les petites ambitions se mirent aussitôt en mouvement. Tous les mandarins en disponibilité commencèrent à intriguer pour obtenir la charge de nous accompagner. Les visites, dès lors, se succédèrent sans interruption ; ce fut comme une avalanche de globules blancs et de globules dorés qui se précipita tout à coup dans les salons du Trésor sacré. Tous ces candidats étaient, à les entendre, des hommes parfaits ; ils possédaient, au plus haut degré, les cinq vertus cardinales, et la pratique des rapports sociaux leur était familière ; ils comprenaient tous combien des étrangers de notre valeur auraient besoins de soins et d’attentions durant le pénible voyage que nous allions entreprendre. Les contrées que nous aurions à traverser leur étaient connues, et nous pouvions compter sur leur expérience et leur dévouement. Si, du reste, ils montraient un tel empressement à nous accompagner, c’est qu’une mission si glorieuse illustrerait leur nom et fixerait leur destinée dans un bonheur immuable.

En réalité, tout ce beau zèle signifiait qu’il y aurait sur notre route une petite fortune à recueillir pour celui qui aurait la chance de nous escorter. Selon les bienveillantes intentions du vice-roi, nous allions voyager comme de hauts fonctionnaires. Dans ce cas, tous les