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ou, pour mieux dire, ce qui constitue la vitalité et la force d’une nation. Pour connaître l’homme tout entier, il ne suffit pas de remarquer les mouvements, de disséquer les membres et les organes, il faut surtout étudier et approfondir son âme, qui est le principe de la vie et le mobile de toutes les actions.

Depuis le treizième siècle, où les premières notions sur la Chine furent apportées en Europe par le célèbre Vénitien Marco-Polo, jusqu’à nos jours, tout le monde s’est accordé à regarder les Chinois comme un peuple très-curieux et fort singulier, un peuple à part dans le monde. Si on excepte cette première notion, généralement admise, on ne trouve guère, dans les écrits concernant les Chinois, que des idées contradictoires. Les uns sont en perpétuelle admiration devant eux, et les autres ne cessent de les couvrir de mépris et de ridicule. Voltaire a tracé avec amour et prédilection un tableau ravissant de la Chine, avec ses mœurs patriarcales, son gouvernement paternel, ses institutions basées sur la piété filiale, et sa sage administration, toujours confiée aux hommes les plus savants et les plus vertueux. Montesquieu, au contraire, nous a peint des couleurs les plus sombres cette race misérable et abjecte, toujours courbée sous un despotisme abrutissant, et se mouvant comme un vil troupeau au gré de son empereur. Ces deux portraits dessinés par les auteurs de l’Esprit des lois et de l’Essai sur les mœurs, ne ressemblent nullement aux Chinois ; il y a de part et d’autre exagération, et nous pensons que, pour être dans le vrai, il faut se tenir entre ces deux opinions.