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Valérie se réveilla de bonne heure, le lendemain, et, après que la Mariette l’eut habillée elle ouvrit la porte-fenêtre de sa chambre qui donnait sur une galerie extérieure. De là, on voyait une moitié de la ville et la Vézère qui la coupait en deux. En face, au delà de l’eau, de vieilles maisons où la pierre, la brique et le bois se mélangeaient bizarrement, bordaient la rive et avançaient jusque dans la rivière les piliers qui soutenaient les galeries irrégulières superposées sur lesquelles s’ouvraient à chaque étage, les portes des chambres. Au moyen de cordes tendues sous les galeries, du linge séchait à l’abri, et des filets de pêche, et des hardes sombres sur lesquelles piquait la note éclatante d’un mouchoir à carreaux multicolores, ou le jupon rouge d’une ménagère originaire du causse de Salignac. Les crépissages, moisis par les brouillards de la rive, roussis par le soleil, écaillés par les gelées, laissaient, par endroits, apparaître les briques et faisaient, par le beau temps des oppositions de teintes variées, capricieusement nuancées par les jeux de l’ombre et de la lumière : tout cet ensemble de constructions demi-fluviales étaient alors d’une fantaisie pittoresque à ravir un artiste.

Mais, en ce moment, une pluie fine tombait serrée, ruisselant des toits de pierre ou d’ardoises et enveloppait la ville d’une buée grisâtre et terne d’où ressortaient à peine les piliers et les poutres entrecroisées des galeries. Au-dessus de ces maisons de la rive, d’autres se groupaient en amphithéâtre sur le coteau en pente roide, escaladaient les rochers et montaient jusqu’aux anciens remparts dominés par les restes d’un vieux château ruiné par la Révolution. Au pied des murs de la terrasse de la maison de La Ralphie, la rivière, grossie, roulait ses eaux rouges comme un fleuve de chocolat. En amont, elle ser-