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à nez avec Anatole Decoureau qui allait à la pharmacie, ou plutôt chez Mme Renac. Cette rencontre contraria fort M. le maire, mais il était trop tard pour reculer. Il continua donc, et, n’osant faire autrement, salua en rechignant, tandis que Valérie souriait sarcastiquement.

Comme elle passait sur la place, devant l’église, le portail s’ouvrit et l’abbé Sagnol parut. En la voyant, il s’arrêta court et resta un instant immobile, encadré dans la large baie où il se détachait en vigueur avec sa carrure athlétique, pareil au saint Christophe de la légende. Quant à Valérie, un flot de sang lui monta soudain à la tête et, en une seconde, tout son être flamba. Elle eut pourtant la volonté de pousser son cheval et de poursuivre son chemin, tandis que le vicaire la saluait.

— Faurille, voulez-vous me donner un verre d’eau fraîche ? dit-elle en arrêtant « Kébir » devant l’ancienne maison du vieux jacobin Latheulade.

— Oh ! demoiselle ! bien sûr… avec un peu de quelque chose dedans…

— Non pas, merci, de l’eau toute pure.

Ayant bu sans mettre pied à terre, elle demanda les clefs de sa maison.

— Je vais vous aller ouvrir, demoiselle !

— C’est inutile, ne vous dérangez pas… tenez, voici pour votre petite, ajouta-t-elle en donnant à la Faurille la pâte de jujube qu’elle avait achetée uniquement pour se gaudir des grimaces hypocrites du pharmacien.

Arrivée devant la maison de la rue de la Barbecane, elle se laissa glisser à terre, attacha « Kébir » à un anneau et entra.

Elle parcourut les chambres, ouvrit les contrevents, puis revint s’asseoir dans la salle et songea.