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Deux jours après, muni des derniers sacrements, sauf le viatique, qu’il refusa sous le spécieux prétexte d’une obstruction du pharynx, le commandeur Rufin de Lussac passa de vie à trépas avec sa philosophie ordinaire.

— Puisqu’il faut en venir là, nécessairement, dit-il à Valérie, faisons-le de bonne grâce. J’aurais tort de récriminer, d’ailleurs ; ma jeunesse a été bien remplie et je l’ai fait durer cinquante ans. Dans mes dernières années, j’ai trouvé en vous une amie véritable, ce qui n’est pas peu de chose et ce sur quoi je ne devais raisonnablement pas compter. L’amour a réjoui l’homme, l’amitié a consolé le vieillard ; tout est pour le mieux : adieu, ma chère enfant !

Le lendemain, le vieux gentilhomme fut déposé en grande pompe dans le caveau des La Ralphie, où Valérie lui donna l’hospitalité dernière.

Un peu moins de quatre mois s’étaient écoulés lorsqu’il fallut rouvrir la sépulture de famille. Un soir, le petit Gérard fut pris d’un accès de ces convulsions terribles, si redoutées des mères. Tandis qu’on courait à Fontagnac chercher M. Bernadet, les crises redoublaient d’intensité ; et, lorsque le docteur arriva, vers onze heures, son état était désespéré. Les remèdes et les soins furent inutiles, et, sur les trois heures du matin, une dernière convulsion l’emporta. Il se tordit dans les bras de sa nourrice ; ses yeux devinrent vitreux, ses traits se contractèrent, sa bouche se crispa horriblement et il resta immobile, mort.

Après les épouvantables angoisses de cette nuit, Valérie, folle de douleur, tomba comme foudroyée et ne reprit ses sens que pour se livrer à des actes qui accusaient une éclipse passagère de sa raison. Elle voulut se jeter par la fenêtre, et il fallut les efforts