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fois dans nos mauvais chemins ; joint à ça qu’on ne risque pas tant de faire attraper du mal à ses bêtes, et qu’on ne se fait pas tant de mauvais sang.

Mais d’un autre côté, toutes ces routes, tous ces chemins font qu’on sort plus souvent de chez soi, pour aller dans les villes où on laisse son argent, tandis qu’autrefois l’endroit en profitait. Avec toutes ces facilités de voyager, on s’est habitué à aller se divertir dans les villes, ce qui coûte cher, et on méprise les divertissements de chez soi, qui ne coûtent quasiment rien, et sont plus sains de toutes les manières. C’est à cause de cette facilité, que petit à petit, les gens trompés par les semblants, se sont dégoûtés de la campagne, et qu’on en voit tant vendre leur morceau de bien, et s’en aller dans les villes, croyant y trouver une place, ou un travail moins dur, ou mieux payé. En quoi les pauvres gens sont bien malavisés car le travail des villes est plus exigeant, plus attachant, et plus mauvais pour la santé, sans parler de la liberté : misère pour misère, mieux vaut celle des campagnes.

Tout ça, c’est pour dire qu’il n’y a pas de bonne chose qui n’ait ses défauts. Ainsi quand je parle des anciennes frairies, ce n’est pas que je veuille dire qu’elles étaient exemptes de toute chose blâmable. Il y a une chose, par exemple, que je n’ai jamais pu voir de sens rassis, c’est assommer un coq à coup de pierres.

On attachait le pauvre animal par une patte à un petit piquet planté en terre, et de vingt-cinq pas, pour deux liards, on lui tirait : tant de pierres. Celui qui le tuait l’emportait. Mais les coqs ont la vie dure et avant d’être morts ils souffraient bien. Une pierre leur cassait une patte, une autre leur démontait une aile, et lorsque quelque gros caillou leur arrivait en plein corps, les voilà sur le flanc dans la poussière, comme morts. Mais l’individu qui faisait