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en fûmes tristement, elle inquiète de l’avenir, moi désolé de quitter Lina.


Le lendemain, il fallut recommencer à courir les villages autour de la forêt pour chercher des journées. Mais lorsque, le soir venu, nous fûmes de retour à la tuilière sans avoir rien trouvé, j’étais bien las, tellement las que ma mère se désolait, ne sachant comment faire, me laisser seul, ou me traîner toute une journée après elle. Moi, le matin, la voyant en cette peine, je lui dis que j’étais reposé et que je marcherais bien. Là-dessus, nous voilà en route, cheminant doucement, nous arrêtant de temps en temps, elle me portant quelquefois, malgré que je ne voulusse pas. Cela dura trois ou quatre jours comme ça, pendant lesquels nous ne profitions guère, nous crevant à chercher inutilement du travail et n’ayant plus le bon ordinaire de chez Géral, lorsqu’un soir, en passant à la Grimaudie, un homme nous dit que le maire de Bars nous mandait d’y aller sans faute le lendemain.

Nous voici donc partis le matin, et, sur les neuf heures, nous arrivions dans l’endroit. Une femme qui épouillait son drole devant la porte, écachant les poux sur un soufflet, nous montra la maison. Ayant cogné, ma mère ouvrit la porte lorsqu’une grosse voix nous eut crié d’entrer.

Un chien courant, maigre comme un pic, qui dormait devant le feu, se lança sur nous en aboyant.