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les femmes du bourg, mues par la curiosité, une à une, deux par deux, arrivaient sur la petite place, qui filant sa quenouille, qui faisant son bas ou de la tresse de paille pour les chapeaux. Elles furent bientôt là une vingtaine, avec leurs droles pendus à leurs cotillons, et puis quelques vieux érenés, et même La Ramée qui fumait son brûle-gueule.

Au bout d’une demi-heure, ou trois quarts d’heure, que je ne mente, lorsque le nouveau curé traversa la place pour s’en retourner, tout ce monde le regarda de travers.

— Eh bien, mon brave, dit-il en passant à La Ramée, vous fumez votre pipe ?

Et comme le vieux soldat l’avisait d’un mauvais œil, sans répondre, il ajouta :

— Vous n’êtes pas bavard !

— Ça dépend.

— Alors, ce serait que je ne vous conviens pas ?

— Il se pourrait.

— Vous n’êtes pas bien gêné !

— Je suis comme ça.

Voyant que La Ramée continuait de tirer des bouffées sans plus dire mot, que les hommes ne le saluaient pas, et que les femmes faisaient semblant de ne pas le voir, le curé, tout étonné, grommela quelque chose entre ses dents et s’en alla.

Pendant qu’il était encore à portée d’entendre, Cariol, de la charrette, cria à La Ramée :