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l’avaient pas écouté, comme la Mïon de Puymaigre.

— Bon, dit l’avocat, je l’ai fait citer comme témoin, avec d’autres.

Lorsqu’il eut fini ses questions, il expliqua à ma mère ce qu’il fallait dire devant la Cour et comment ; qu’elle devait narrer tout au long les poursuites malhonnêtes de Laborie, et raconter une par une toutes les misères qu’il leur avait faites et fait faire, à cause de ses refus de l’écouter. Il lui recommanda bien de dire, ce qui était la vérité, que mon père était fou de rage et qu’il n’avait tiré sur Laborie qu’en le voyant rendre au garde le fusil avec lequel il l’avait blessée au front, et puis tué sa chienne.

Lorsque nous fûmes pour nous en aller, l’avocat demanda à ma mère où nous étions logés, et, après qu’elle lui eut répondu ne savoir encore où nous gîterions, venant seulement d’arriver, il prit son chapeau et nous emmena dans une petite auberge dans la rue de la Miséricorde. Après nous avoir recommandés à la bourgeoise, il dit à ma mère de ne pas manquer d’être à dix heures au tribunal, le lendemain ; et, comme elle lui demandait s’il avait bon espoir, il fit un geste et dit :

— Tout ce qui est entre les mains des hommes est incertain ; mais le mieux est d’espérer jusqu’à la fin.