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Tout dans l’univers, soit physique, soit moral, se perfectionne
par gradation.

Tout prouve dans la nature comme dans l’art, dans le physique comme dans l’intellectuel et le moral, qu’il est établi un point fixe d’intégrité, auquel les êtres montent par degrés. Nous ignorons l’essence des choses les plus simples et les plus bornées ; nous ne savons si elles sont susceptibles ou non d’une subite intégrité, et, par conséquent, si la toute-puissance pouvait, ou non, les y porter sans gradation. Je ne conteste point sur l’affirmative ou la négative ; je ne me tiens qu’à l’extérieur sensible de ses procédés : les phénomènes qui me les montrent, me laissent voir partout, jusques dans l’aile du moucheron, un développement successif ; j’éprouve, je sens les progrès de ma raison : je puis donc dire, avec fondement, que par une analogie merveilleuse, il est dans le moral des accroissements favorables, et que les lois de la nature, malgré leurs forces et leur douceur, n’acquièrent que par degrés une autorité entière sur l’humanité : de sorte que d’abord les nations qui s’assemblent, sentent plutôt l’utilité d’une société en général, qu’elles ne comprennent nettement quelle doit être la meilleure. Ce n’est que par une longue suite d’erreurs morales, par mille épreuves, que la raison humaine découvre enfin, que nulle situation ne peut être plus heureuse que l’état de simple nature ; mais comment les nations pourraient-elles l’apprendre, si elles ne passaient par plusieurs formes de gouvernement, par plusieurs systèmes, dont les défauts dussent tôt ou tard réunir tous les suffrages en faveur de la nature ?

Presque tous les peuples ont eu, et ont encore une idée d’un âge d’or, qui serait véritablement celui où