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pourrait amener les facultés des animaux ? Qui empêche en effet de croire que ces derniers ne puissent devenir par la suite, dans certaines limites fixées par la nature, les vrais domestiques et, pour tout dire, les familiers de l’homme. — L’antiquité nous révèle des faits semblables, surtout quand on s’approche de l’Inde, ce berceau de la civilisation des peuples. Orphée, Bacchus, avaient, dit-on, adouci les tigres, au point de les atteler à leurs chars, comme des animaux domestiques. Bacchus leur servait du vin dans des coupes ; la musique, le chant, les sons de la lyre achevaient leur éducation. Faut-il voir dans ces fables de simples jeux d’imagination poétique, ou l’histoire, plus ou moins ornée, d’essais très anciens de domesticité, entrepris sur des animaux féroces ? De telles expériences sont à refaire aujourd’hui ; je m’étonne qu’on n’ait encore soumis les tigres et les lions du Jardin des Plantes à aucun traitement utile ; peut-être existe-t-il, en effet, dans certaines liqueurs enivrantes, dans les sons combinés d’une musique tendre et amollie, des vertus efficaces pour adoucir le naturel farouche des animaux eux-mêmes ? Ce qui a lieu dans certains cas de délire furieux me le donne à penser. L’action de la domesticité répandra peut-être, un jour, une sorte d’ivresse sur les monstres enchantés par elle et soumis.

Mais tenons-nous au présent et à la réalité. L’instinct des animaux domestiques étendu par l’éducation et combiné avec l’art des machines, nous rendrait d’ici à peu de temps des services que nous ne soupçonnons pas encore. Jusqu’ici l’agriculture n’a re-