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isolés, apparus et disparus, que des émissions d’êtres engloutis dans des révolutions fortuites du globe, et auxquels d’autres êtres avaient succédé. Abandonnant ce système de cataclysmes et de bouleversemens, Geoffroy déroule l’histoire de la création sur un plan nouveau, à-la-fois plus calme et plus harmonieux. A ses yeux, il n’existe dans les époques anciennes et modernes qu’un règne animal ; mais ce règne animal, soumis à l’action des causes environnantes, aux milieux ambians et à tous les agens modificateurs du globe, a dû changer avec les changemens survenus dans la masse. L’ensemble, en se transformant, a entraîné le détail. Ce principe qui lie la création actuelle à la création antérieure, qui noue par des anneaux intermédiaires la chaîne des animaux vivans à celle des animaux détruits, est sans doute dans l’état actuel de la science d’une démonstration difficile. Arrivera-t-on un jour à retrouver parmi toutes ces variétés de formes, un seul animal, comme au fond il n’existe qu’un créateur et qu’un monde ?

La vaste intelligence de Geoffroy s’exerça encore contradictoirement à Cuvier sur la question des monstruosités. L’école de Cuvier se servait depuis long-temps de ces anomalies apparentes pour ébranler la croyance à la fixité des lois de la nature. Geoffroy arriva d’aplomb sur la difficulté : c’est au milieu du désordre le plus choquant des principes de l’organisation qu’il fit surgira notion de l’ordre et qu’il montra la nature toujours d’accord avec elle-même, sibi conscia. Son esprit généralisateur sut ramener les formes, en apparence excentriques, de ces êtres d’ex-