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Cet esprit synthétique avait en effet lutté toute sa vie pour établir en zoologie cette grande loi d’unité de composition organique, en vertu de laquelle tous les animaux peuvent être ramenés à un seul animal. Déjà sa pensée avait surnagé dans la plupart des livres de zoologie moderne, où les formes diverses des êtres vivants n’étaient plus considérées que comme des accidens jetés sur une échelle immense, et dont tous les degrés tiennent les uns aux autres par des rapports naturels. Cuvier n’admettait pas cette unité dans la variété. Esprit analytique, il limitait chaque être organisé dans une forme éternellement invariable et absolue, dont la science devait se borner à décrire isolément les caractères. — Méthode des premiers âges ! s’écriait Geoffroy ; ayez donc le courage de faire un pas en avant ; la nature est une : elle emploie les mêmes matériaux en les transformant sans cesse sous sa féconde main, sans s’écarter jamais d’un plan général d’organisation. — Rêves de poète ! reprenait Cuvier. — Historien de ce qui est, continuait Geoffroy, j’ai cherché mes observations dans l’univers terrestre ; au-dessus de toutes les variétés qui résultent chez les êtres vivans du milieu dans lequel ils sont plongés, je vois planer constamment et partout autour de moi des rapports immuables.

C’est sur ce point que la mêlée s’engagea : mais le terrain de la science est si vaste, que l’arène s’élargissait chaque jour, devant les attaques des deux lutteurs. Le débat se plaça bientôt sur les ruines des mondes antédiluviens. Cuvier ne voyait dans ces créations retrouvées sous la terre que des faits soudains,