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Je veux, pour reposer durant ma nuit obscure,
Un lit qu’auront creusé les mains de la nature,
Et son vert gazon pour coussin ;
Comme l’enfant bercé dans les bras de sa mère,
Moi, je veux en sortant de cette vie amère
Dormir et rêver sur son sein.

Qu’elle orne mon tombeau des fleurs si tôt fanées :
Que les feuilles des bois par le vent moissonnées
Tapissent mon dernier séjour ;
Que l’arbre qui renait sur la terre bénie,
Me dise en me montrant sa branche rajeunie ;
« Ainsi tu revivras un jour ! »

Qu’il s’élève au penchant d’une verte colline,
Pour qu’aux heures du soir, quand le soleil décline,
Il lui jette un dernier coup d’œil ;
Pour qu’au matin, les fleurs humides de rosée
Inclinant sur mon front leur tête balancée,
Pleurent autour de mon cercueil :

Qu’un ruisseau passe auprès ; que l’oiseau qu’on repousse
Y suspende son nid de duvet et de mousse,
Loin des embûches des vivans.
Si tout autre m’oublie, au moins quand le jour tombe
Qu’il me reste ici-bas, pour veiller sur ma tombe
Un cyprès qui frémit aux vents.