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Ô que Paris est laid ! Sous ses sombres nuages
Que j’ai souvent rêvé de longs et beaux voyages !
J’aimerais tant le ciel, les palmiers d’Orient,
La gazelle qui fuit à l’ombre des platanes,
Et sous un dais brodé les magiques sultanes
Qui regardent en souriant.

Ou, dans un vieux donjon, ma muse châtelaine
Vide près du foyer sa coupe de vin pleine ;
J’ai des vassaux, le soir, qui parlent du vieux temps ;
Un ami vient s’asseoir près de l’âtre fidèle.
Je vois à ma fenêtre un nid où l’hirondelle
Doit revenir pour le printemps.

Dans un monde encor vierge, aux champs d’Océanie
Je voudrais promener ma fortune bannie ;
Moi je suis fils des eaux, de l’orage et des vents ;
Je voudrais, habitant d’une cité flottante,
Vivre au milieu d’un fleuve et déployer ma tente
Sur les joncs et les flots mouvans.

Vains rêves ! Pour voler, mon coursier n’a pas d’aile.
Personne ne voudra me prendre en sa nacelle ;
L’argent, froid positif, m’enchaîne sur ces bords ;
On ne peut pas franchir l’Océan à la nage,
Et les flots, sans salaire, au milieu de l’orage
Ne voiturent que les corps morts.