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sateurs) d’établir la vérité de la dénonciation et de prouver la réalité de la conspiration. » Mais ce n’était pas assez d’établir qu’il y avait eu une conspiration ; il fallait déterminer par des pièces la part de chaque accusé dans l’entreprise. Et ici, l’embarras du ministère public se renouvelait. On avait trouvé auprès de Babeuf, le 21 floréal, près de cinq cents pièces, dont une centaine de sa main ; sa culpabilité était évidente ; mais il n’en était pas de même des autres accusés. Ou bien il n’y avait dans les dossiers que des copies de leur correspondance, ou bien les experts hésitaient à leur attribuer les pièces compromettantes qui n’étaient pas signées : enfin on ne savait pas s’ils avaient assisté aux séances du comité. Du moins on ne le savait que par un témoin, Grisel. Or il était incorrect de faire comparaître Grisel, parce que la loi défendait de se servir du témoignage des dénonciateurs intéressés. La question de la comparution de Grisel aux débats fut l’une des plus violemment débattues. Le président passa outre. Et alors en joignant le témoignage de Grisel aux documents du procès, on put à la fois établir qu’il y avait eu commencement d’exécution et fixer les responsabilités de chacun des accusés.

La détermination de la peine n’en restait pas moins très difficile. La participation à une conspiration contre la sûreté de l’Etat entraînait la peine de mort. Cette question étant la seule posée, si le jury déclarait qu’il n’y avait pas eu conspiration, le procès aboutissait à un acquittement général ; et s’il répondait affirmativement, non seulement il lui était interdit, pour les membres actifs du mouvement, de faire varier la peine avec la responsabilité encourue, mais encore il condamnait à la mort des inconscients, de misérables comparses, un Pillé, copiste, qui n’avait fait que transcrire des pièces, un Boudin, tourneur, qui avait fabriqué les bâtons au bout