Page:Espinas - La Philosophie sociale du XVIIIe siècle et la Révolution.djvu/324

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

remment réglé les choses, ils auraient sans doute établi que le mérite des bras valait celui de la tête, que la fatigue de tout le corps pouvait être mise en compensation avec celle de la partie ruminante. » Ainsi toutes ces formes de la propriété, hérédité, aliénabilité, diversité de valeur attribuée aux tâches diverses, se réunissent pour l’oppression et le dépouillement des non-propriétaires ou moins habiles actuels et futurs. Car avoir ou gagner plus que le nécessaire, c’est frustrer les autres d’autant. « Rien n’est mieux prouvé que cette maxime. » Tout riche est coupable. Toutes nos institutions civiles, nos transactions réciproques, « ne sont que les actes d’un perpétuel brigandage, autorisé par de barbares lois, à l’ombre desquelles nous ne sommes occupés qu’à nous entre-dépouiller. » « Celui même qui prouverait que, par l’effet de ses seules forces naturelles, il est capable de faire autant que quatre e et qui en conséquence exigerait la rétribution de quatre, n’en serait pas moins un conspirateur contre la société, parce qu’il en ébranlerait l’équilibre par ce seul moyen et détruirait la précieuse égalité. »

Ainsi donc le droit naturel peut être méconnu par les conventions sociales, par les lois, aussi bien par celles que la majorité a ratifiées que par celles qui sont l’œuvre de pouvoirs arbitraires, puisque la Constitution de 1793 elle-même consacre la propriété et l’hérédité des biens. Mais le pacte social qui fonde le droit et qui a comme condition imprescriptible non seulement que nul ne souffre de la vie sociale, mais que tous en goûtent largement les bienfaits, le pacte social exige la suppression de toutes ces lois antiégalitaires. « Il est clair que tout ce que possèdent ceux qui ont au delà de leur quote-part individuelle dans les biens de la société est vol et usurpation. Il faut donc le leur reprendre. » Il faut de même faire cesser les gains illicites de celui qui, à forces égales, en raison de