Page:Ernest Renan - Le livre de Job, Calmann-Levy, 1860.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Trois mille ans ont passé sur le problème agité par les sages de l’Idumée, et, malgré les progrès de la méthode philosophique, on ne peut dire qu’il ait fait un pas vers sa solution. Envisagé au point de vue des récompenses ou des châtiments de l’individu, ce monde-ci sera un sujet de dispute éternelle, et Dieu infligera toujours d’énergiques démentis aux maladroits apologistes qui voudront défendre la Providence sur cette base désespérée. Le scandale qu’éprouvait le psalmiste en voyant la paix des pécheurs, la colère de Job contre la prospérité de l’impie sont des sentiments justifiés en tous les temps. Mais ce que ni le psalmiste ni l’auteur du livre de Job ne pouvaient comprendre, ce que la succession des écoles, le mélange des races, une longue éducation du sens moral pouvaient seuls révéler, nous l’avons appris : au delà de cette chimérique justice que le bon sens superficiel de tous les âges a voulu retrouver dans le gouvernement de l’univers, nous apercevons des lois et une