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Histoire d’un paysan.

« Défends-toi bien ! » (Page 214.)
« Défends-toi bien ! » (Page 214.)

content… Le coup de Nicolas est guéri… Je ne sens plus mon mal ! »

Il disait cela, parce que c’était un honnête homme, et que rien au monde ne pouvait lui faire plus de peine que la trahison d’un de ses fils contre son propre sang et son propre pays, mais alors il fut soulagé.

Maître Jean aussi m’embrassa : car il pensait bien que j’allais joliment défendre sa ferme de Pickeholtz, et que si les autres revenaient, ça ne serait pas de ma faute. Il avait raison ; avant de lui toucher un cheveu, il aurait fallu me hacher en mille morceaux.

Enfin, voilà, je ne dis ni plus ni moins que la vérité ; l’enthousiasme qui dure vient de la justice, du bon droit et du bon sens.

Je n’ai pas besoin de vous peindre les cris,

les embrassades, les poignées de main et les jurements de vaincre ou mourir ; chacun sait que c’est toujours la même close, et que depuis, en trompant le peuple avec leurs mauvaises gazettes, des êtres remplis d’orgueil et de bêtise sont parvenus à exciter le même enthousiasme, pour des guerres qui ne regardaient pas la France et qui lui ont fait le plus grand tort. Seulement cette fois c’était sérieux ; la nation avait de l’enthousiasme pour son propre compte ; elle se battait pour défendre ses biens et sa liberté, cela vaut mieux que de se faire massacrer pour la gloire d’un roi ou d’un empereur.

Aussi je me rappelle toujours avec attendrissement ces hommes et ces femmes, ces vieux et ces vieilles, tout courbés et pliés, les bras