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Commandement, sauf l’abrogation du décret du 2 décembre 1915 créant un généralissime.

Je lui demande s’il est vrai que Lloyd George a réclamé le remplacement de Joffre. Il me répond : « Vous m’en demandez trop. »

Après le départ de Loti, sensiblement vieilli, Anatole France dit : « C’est étonnant, comme il a passé soudain de l’adolescence à la vieillesse. »

— On m’apprend que Joffre a une péniche à Bougival où il vient souvent le dimanche.

— Le 26. En fin de journée, visite au colonel C… qui dirige les Informations militaires à la Maison de la Presse. C’est une maison neuve, à locataires, toute occupée par des bureaux de propagande. C… était avec moi à Polytechnique. Nous ne nous étions pas revus depuis cette époque. Il croit au triomphe de l’artillerie lourde et me demande si on a trouvé, aux Inventions, une méthode pour s’affranchir de la guerre de tranchées. Il n’en voit pas.

— De Tristan : au cours d’une trêve de tranchées, un coup de feu part sur un Français. Il veut en avoir le cœur net et va jusqu’aux Allemands. Il les trouve en train de houspiller celui qui a tiré : « Il ne savait pas. Il est arrivé ce matin. »

— On voit des articles intitulés « Gare la paix ». Un autre, qui excite à une haine inextinguible : « Brandons de paix. » On m’assure qu’il est d’une femme.

— La pensée qu’on va peut-être supprimer le gaz arrache ce cri à un chauvin : « Mais alors ! Mon bain ? »

— On est stupéfait — on le sera surtout — de voir, en lisant les comptes rendus de la Chambre, les députés décider de la vie des autres : « Nous donnerons jusqu’au dernier homme… »