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Avant dîner, visite du couple Fernand Gregh. Puis Jean Hennessy. Je félicite ce dernier de sa campagne pour la Société des Nations, qui pénètre au front.

À table, France me dit que ma dernière lettre lui a donné beaucoup à réfléchir, que, dans ses nuits d’insomnie, il tourne et retourne les mots qu’il pourrait écrire, pour rendre la raison à la terre. Mais quoi ? Nulle feuille à grand tirage n’accueillerait sa prose. Et, à ce propos, il évoque le directeur d’un de ces grands journaux qui disait, il y a deux ans : « Bon Dieu de bon Dieu, il faut que ça finisse, il faut éclairer l’opinion, bon Dieu. » Il projetait de créer une feuille pacifiste dont il ne s’avouerait pas le patron, où l’on aurait essayé des auteurs, des articles… Cela n’eut pas de suite.

France dit aussi, à propos des soldats qu’on fusille s’ils ne marchent pas à l’assaut : « Je m’étonne qu’on glorifie l’héroïsme de gens qu’on force à être des héros. »

— Curieux spectacle du bois de Boulogne pendant l’alerte nocturne du 15 au 16. Les ouvriers de guerre, hommes et femmes, de Suresnes, Puteaux, Courbevoie, cessent le travail pendant l’alerte. Il faisait clair de lune. Tous s’étaient répandus dans le bois et profitaient de l’aubaine pour faire l’amour.

— Le 17. Naturellement, la « main allemande » apparaît dans les grèves.

— On devrait dire : « Mort au Champ d’horreur. »

— Le Petit Parisien raille les Allemands qui donnent le nom de huit généraux à huit tours d’un vieux Burg. Le hasard de la mise en page juxtapose une deuxième note à la première : « Les Américains vont donner le nom de huit généraux français à huit pics des Montagnes Rocheuses. »

— Toute propagande pour la guerre est encou-