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tée et assez choquée lorsqu’elle apprit que ces jeunes soldats démolissaient ma porte pour pénétrer dans mes champs avec de galantes Tourangelles et faire l’amour sous un bouquet d’arbres.

« Tout à l’heure, j’ai eu l’honneur de recevoir Arthur Dehon Hill, major, judge avocate, homme d’âge, de sens rassis, qui me parla pendant une heure avec beaucoup de savoir, d’esprit et de jugement et me déclara, en prenant congé, que les Américains mettraient quatre ans à finir la guerre. Après lui avoir exprimé l’admiration et la reconnaissance dues à une telle résolution, je lui présentai timidement quelques objections que vous devinez sans doute, chère Madame. Mais il n’en parut nullement touché. Je reçus ensuite un industriel de New-York, volontaire, simple soldat, occupé à des œuvres de guerre. Il vient de fonder à Joué une grande manufacture de savon.

« J’écrirai demain à Michel Corday une lettre où je mettrai tout mon cœur, sinon toute ma pensée… »

La lettre annoncée (du 24 avril) dit notamment :

« À Tours, la richesse afflue. Les ouvrières de la poudrerie portent des bas de soie. Les marchands sont reluisants de graisse. Des commerçants parisiens viennent s’établir dans notre ville… De vastes usines s’élèvent aux environs. La campagne est heureuse. Mais la Béchellerie n’a ni charbon ni essence… »

— Le 2. Dîner avec Anatole France à l’hôtel Powers. Il a voté pour Barthou, puis pour Gregh, contre le « ratichon ». Il déclare qu’il ne retournera plus à l’Académie. Il m’offre son habit vert, qui se mange aux mites, comme épouvantail à moineaux dans les cerisiers de Serbonnes.

— Le 3. Le procès du Bonnet Rouge s’est ouvert dans une demi-indifférence. On note l’habileté de