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— Les communiqués sur le bombardement de Paris sont brefs. Le texte est en moitié consacré aux visites de Poincaré aux lieux sinistrés et aux victimes. Je ne sais rien de plus pénible que cette publicité au sang.

— Le 26. Journée anxieuse, pareille à celle de fin août 1914. On s’aborde : « Vous savez quelque chose ? » On apprend que les Allemands sont à Albert, à Bray-sur-Somme, qu’ils ont pris Roye, Lassigny. Ils dépassent les anciennes lignes qu’ils ont abandonnées voici juste un an. Le G. Q. G. a quitté Compiègne. On s’écrase dans les gares.

— Lettre d’Anatole France. « Nous devons ignorer et nous taire… Ce qui me trouble, c’est qu’il y ait tant de choses à ne pas savoir… Les jeunes Américains qui viennent me voir m’apportent des paroles rassurantes : ils m’annoncent que la guerre durera encore trois ans au plus… »

— L’anxiété continue tout le 27. Foule dense aux gares. Des troupes de voyageurs, qu’on n’admet plus que sans bagages, s’alignent jusque dans la rue. Retraits d’argent dans les banques. On craint qu’en cas d’occupation de Paris les Allemands ne saisissent les dépôts.

— Le 28. Une circulaire notifie au personnel des administrations publiques, en cas de bombardement à l’ypérite, de se dévêtir complètement et de se laver à l’hyposulfite. Comme il y a maintenant autant de femmes que d’hommes, on sourit.

— Le 28 j’apprends la prise de Montdidier par les Allemands. Ironie des choses… C’est au mariage d’un fils de Tristan, dans la rumeur joyeuse de la réception, parmi les fleurs, les visages illuminés. La nouvelle provoque un malaise.

— Vraiment c’est à désespérer de la race humaine, tant sa bêtise apparait insondable, dans la grande