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s’agisse du troupeau civil ou du troupeau militaire ?

— Le 16. Déjeuner avec Anatole France. Sur l’affaire Caillaux, il déclare formellement qu’en somme il vaut mieux que la haine contre Caillaux se soit fixée en une accusation ouverte. Peut-être les deux grands partis représentés par Clemenceau et Caillaux vont-ils se grouper et se compter, chacun sous sa bannière.

— Le 17. L’emprunt a été clos le 16. Jusqu’au bout, on colla de nouvelles affiches. Victoires échevelées et gueulantes, drapeaux au vent. Au cinéma, on projetait d’immenses cimetières militaires avec l’objurgation de venger nos morts. On me dit enfin qu’on accorda des permissions aux soldats qui voulaient souscrire.

— Une appréhension pèse sur la ville et la vie. Peut-être s’imagine-t-on que les troupes allemandes rendues disponibles par l’armistice russe vont être instantanément transportées et mises en action ?

C’est le 16 au soir qu’on a su la signature de cet armistice, un des plus grands événements de cette guerre. On s’en tait, comme d’un deuil.

— Par contre, on parle d’une détente intérieure. Le Cabinet serait décidé à laisser comparaître Caillaux devant la Haute-Cour, moins dangereuse, paraît-il, pour sa vie et sa sécurité, que le conseil de guerre.

— Le 18. Déjeuner avec Painlevé. Il entreprend tout de suite d’expliquer son rôle ministériel : « J’étais né faible… »

— Le 19. C…, qui lit l’analyse quotidienne de la presse allemande, y voit — par les fureurs mêmes des pangermanistes — que les maximalistes, dans leurs conditions de paix, demandent le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et en particulier l’examen de la question d’Alsace-Lorraine. Quand on signale cet indice à nos orthodoxes, ils ragent,