Page:Envers de la guerre - tome 2-1916-1918.djvu/160

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mis. Récemment, on y relevait de Barthou un portrait nerveux, mesuré, exact, n’oubliant rien — pas même l’accolade d’Anatole France.

— Ah ! L’impossible et bel article, sur le Crime académique, sur ce que le désir d’y entrer fait faire à un Bourgeois (Bourgeois disant à Anatole France qu’il se foutait de la Présidence de la République et qu’il n’ambitionnait que l’Académie, Bourgeois ébranlé par Poincaré qui lui promettait son influence à l’Académie au moment de la candidature de ces deux hommes à la Présidence). Et la perversion incurable des charmants talents de Donnay, Capus, Lavedan, et l’orientation à droite de tous les candidats de ma génération.

— Le 8. Déjeuner avec Anatole France, Palais d’Orsay.

La paix est facile quand elle n’est pas nécessaire et difficile quand elle s’impose, dit Anatole France.

Il y a, dans ses lettres, des phrases précieuses qui valent d’être montées en bijoux. En voici un fragment, daté de la Toussaint : « Je vous écris par un jour de fête et de pluie d’une tristesse infinie. Le facteur ne vient pas et j’en suis à l’occupation d’Udine. C’est une ville charmante où j’ai passé des heures tranquilles et délicieuses. J’ai écrit à Mme T… une lettre qui ne lui plaira guère. Je ne peux pas pourtant lui dire, comme le brave colonel Rousset, qu’il faut que les Austro-Allemands soient bien épuisés pour pousser une si furieuse offensive et que ce manque de modération est un grand signe de faiblesse… »

D’une lettre du 4 novembre. « Tours est heureuse… Elle donne des signes éclatants de joie et de prospérité. La Censure et les assignats sont deux bonnes choses. La crainte des Sénégalais en est une troisième. La guerre peut durer dix ans. Clemenceau peut venir.