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aura vécu la France, flambeau du progrès, nation démocratique par excellence. Aucun journaliste français n’est admis dans la zone des armées, au contraire de ce qui se passe chez les Anglais, par exemple. Et, se serait-il glissé un reporter au front, qu’il ne pourrait écrire que des choses orthodoxes, sans critiques, car la censure veille. Aussi, personne ne sait ce qui se passe.

— Deux jeunes femmes jouent à ceci : l’Illustration publie les citations à l’ordre du jour, avec le portrait des héros. Cela coûte, je crois, 15 francs à la famille. Alors, dans ces tableaux d’honneur, les jeunes femmes cherchent quelle figure leur plaît le mieux, dans chaque page. Cela les amuse de voir si elles tombent d’accord. Or, l’affreux, c’est que, deux fois sur trois, le préféré est mort. La citation mentionne qu’il a été tué. Et cela ne choque plus ces jeunes femmes, tellement on est devenu insensible.

— Le 5. Des hommes, du haut d’un dirigeable, jettent des bombes sur des femmes et des enfants endormis. Ce ballon est atteint, s’enflamme, tombe. Un million d’êtres, rugissant de joie, défilent devant les cadavres de l’équipage, calcinés et « dorés comme des poulets ». Les journaux anglais disent : « C’est une fête comme le Derby. » Et il y a des gens qui trouvent que la guerre est belle ! La guerre qui, dans les deux camps, a réveillé, développé cette férocité !

— Le 6. Bruit de la disgrâce de Sarrail, remplacé par Gouraud ? Mais Painlevé a toujours déclaré qu’il démissionnerait si on touchait à Sarrail.

— Comme j’attache une importance d’indication à la baisse du mark, Mme  X… dit que je lis l’avenir dans le marck.

— Le 8. L’affaire Sarrail préoccupe plus que