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De cette succession, de ce système physiquement harmonique & mélodique, on aura encore par combinaison, tous les accords & les intervalles possibles, usités dans la pratique, tels que sont ceux de secondes, tierces majeures & mineures; quarte juste, triton, quinte, fausse quinte; sixtes, septiemes majeures & mineures, octave, neuvieme, & encore ceux de quinte, sixte, septieme superflues; tierce & septieme diminuées; mais ces derniers ne pourront se combiner qu’entre les produits ou rapports des nombres primitifs multipliés par eux-mêmes. (Voyez la fig. 6. Pl. XVI. bis). Or la maniere de combiner les intervalles consonnans & dissonnans de ce système, est de prendre pour racine le dénominateur de chaque terme ou fraction (16), de l’élever à son quarré en le multipliant par lui-même, & le produit ou quarré qui résultera de cette opération sera le premier terme de comparaison; en opérant de même pour en avoir un second, on verra que l’intervalle qui naîtra de la comparaison des deux produits ou quarrés, sera du nombre des intervalles harmoniques. Quant aux intervalles dissonnans, la comparaison des dénominateurs simplement les indique dans l’ordre naturel, tels que cette table les présente. Mais afin de rendre la chose aussi claire, par rapport aux intervalles dissonans, superflus & diminués, (17) nous allons nous expliquer au moyen de deux exemples. Je veux trouver les intervalles de 9e. 7e. min. de quinte superflue, &c. Je multiplie le dénominateur 2 par 2; j’ai au produit 4, premier terme de comparaison, qui me désigne ut; j’en fais autant du dénominateur 3, lequel multiplié par lui-même me donne le produit 9, second terme de comparaison qui me désigne re, & je trouve que l’intervalle d’ut à re est exactement celui d’une 9eme, dont le rapport numérique est comme 4. 9, & ainsi des autres. Par ce moyen on trouvera tous les intervalles possibles & pratiqués dans la Musique, avec leurs rapports. Nous ne répondons pas ici des altérations naturelles aux intervalles produits de ces combinaisons. Les harmoniques qu’on nomme improprement dissonans (Voyez Note 15.), sont eux mêmes altérés & sont supportables: le fa & le la en fournissent une preuve connue; aussi leurs produits & , s’en ressentent-ils, ainsi que plusieurs autres, comme on peut le remarquer dans cette table. La quarte, par exemple, qui est exprimée par à , est altérée par excès d'; celle de à , l'est par défaut de ; la tierce majeure exprimée par à , est altérée par excès d'; celle de à , l'est par défaut de ; la tierce mineure exprimée par à , est altérée par excès d'; celle de à , l'est par défaut de ; & la seconde superflue qui est exprimée par à , est altérée par excès de ; & celle enfin qui est exprimée par à , est altérée par défaut de ; & même encore, à considérer la chose attentivement de plus près, on verra que les produits primitifs, c'est-à-dire les sons harmoniques 3, 5, 7, &c. ne sont pas exactement à la rigueur ce qu'on a cru jusqu'à présent qu'ils étoient, c'est-à-dire qu'ils ne forment pas avec l'unité, ou le corps total, les intervalles justes d'une douzieme ou quinte, d'une dix-septieme ou tierce majeure, d'une vingt-unieme ou septieme mineure, &c. que leur altération, au contraire, croît en raison progressive de l'éloignement de la simplicité de leurs rapports avec le son de la totalité; ce qui sert à prouver que l'oreille se contente aussi des à-peu-près à l'égard des intervalles dans la pratique. L'intervalle de septieme diminuée se trouvera aussi dans ce système, mais par un moyen différent de celui qu'on vient d'établir; ce moyen est de réduire le terme 25 à 6¼, & de comparer ce dernier au terme 11. Pour avoir l'intervalle de seconde superflue, qui n'est que complémens de l'intervalle précédent, on comparera 11 à 12½; il en faudra faire autant pour avoir les intervalles de tierce diminuée & de sixte superflue, inverses ou complément aussi l'un de l'autre. Ces quatre intervalles sont les seuls en ce cas, pour lesquels il faille employer la voie de réduction.

Puisque toutes cordes & tous corps sonores, comme il a été prouvé, produisent non-seulement les consonnances d'octaves, quintes, quartes & sixtes, mais encore suivant l'expression commune, les dissonnances de septiemes, neuviemes, & de secondes, &c. on auroit lieu de croire que ce principe physique pourroit être le seul vraiment émané de la nature pour donner partout la loi, & prouver autant l'origine de la mélodie que celle de l'harmonie: on pourroit même ajouter, l'empire que la premiere a sur la derniere; en vertu de ce que l'harmonie proprement dite, ne parle jamais qu'à l'esprit, & que la mélodie au contraire, parle toujours au sentiment; paradoxe apparent pour quelques-uns, mais que l'expérience ne contredit point(*). En effet, quel avantage ne résulteroit-il pas encore de cette succession harmonico-mélodique si on lui donnoit la préférence, puisqu'elle est la plus naturelle de toutes celles qu'on a employées jusqu'à présent, pour former une gamme ou échelle diatonique favorable à l'organe vocal, lorsqu'il s'agit d'intonation! L'intervalle de trois tons de suite, depuis fa jusqu'à si naturel n'est-il pas toujours un écueil inévitable où viennent échouer les éleves, quand ils commencent à entamer leur gamme, & les maîtres, lorsqu'il s'agit de les guider dans cette route habituelle? Au-lieu qu'en leur faisant suivre cette nouvelle route, elle les conduiroit exactement, sans obstacle, au septieme degré; d'où après un repos ils pourroient recommencer une autre gamme aiguë, replique de la premiere, & ainsi de suite, sans autre altération que


(18) Si l'on emploie ici les fractions, c'est qu'elles représentent la progression harmonique, & servent en même-tems à exprimer les divisions & les vibrations de la corde, expression que l'on pourra néanmoins simplisier aisément pour peu qu'elles nuisent; il ne s'agira pour cet effet que de supprimer le numérateur commun à chaque fraction, alors on aura seulement les dénominateurs, lesquels suivront l'ordre naturel des nombres en proportion arithmétique, ce qui ne détruira rien quant au fond, & deviendra même plus commode pour les combinaisons qui suivent.

(19) Je mets ici à profit l'occasion que me fournissent ces termes pour exposer une nouvelle maniere de chiffrer les intervalles de ce genre. Ainsi les signes plus & moins +, -, sont employés de préférence dans cette figure (ainsi qu'en la fig. C. de la Pl. XVII.) à la suite des chiffres, afin d'éviter l'équivoque qui résulte de la maniere ordinaire de chiffrer les acc. ou superf. ou diminués dans la pratique; & nous pensons que ce moyen, s'il étoit adopté, détruiroit l'arbitraire qui regne non-seulement dans les chiffres que l'on barre indistinctement dans l'un & l'autre de ces deux cas, c'est-à-dire pour le triton ainsi que pour la fausse quinte, mais encore dans tous les autres accords de même genre. Le signe + placé immediatement après le chiffre, désigneroit l'acc. ou l'interv. superflu, & le signe – placé de même, désigneroit l'acc. ou l'interv. diminué; les #, b & , seroient alors les seuls destinés à désigner les intervalles majeurs, mineurs & naturels; le trait oblique pourroit être seul réservé pour désigner la petite sixte ainsi 6. Ces six caracteres seroient bien plus analogues à la construction naturelle des accords qu'ils désigneroient, & par-là deviendroient plus précis pour l'exécution dans l'accompagnement du clavessin.

(*) Voyez au mot Musique, T. X. p. 901. col. 1.