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mi-teintes, en chargeant moins son dessein de crayon. Il comparera aussi les parties ombrées les unes aux autres, les demi-teintes aux réflets, & il réservera ses derniers coups de crayon pour les touches les plus fortes.

L’éleve continuera à copier des desseins de têtes vûes de différens côtés, jusqu’à ce qu’il soit assez familiarisé avec ces premiers principes, pour s’y conformer passablement.

Il dessinera ensuite des piés & des mains, des bras & des jambes, Pl. XII. & XIII. Il s’appliquera surtout à mettre ensemble bien juste, & il ombrera comme nous venons de dire.

Après cette étude réitérée, l’éleve copiera des académies ou figures entieres, Pl. XV. XVI. XVII. XVIII. & XIX. mais auparavant il doit en connoître les proportions générales: c’est à cet usage que nous avons destiné la Pl. XIV. En commençant son dessein, il s’attachera à saisir le tour ou le mouvement de la figure qui lui sert de modele, en l’esquissant légérement au crayon; il observera sur ce modele les parties qui se correspondent perpendiculairement & horisontalement, afin de les mettre chacune à leur place les unes à l’égard des autres. Aidé par les proportions qu’il connoît déja, il se conformera à celles du dessein qu’il copie, c’est-à-dire aux proportions réciproques de toutes les parties, à la figure entiere. Enfin lorsqu’il croira être sûr de toutes ces choses, il fortifiera les contours de sa figure en y donnant toutes les finesses de détail, le caractere & la légéreté de l’original; il indiquera les formes extérieures & apparentes, occasionnées par la position intérieure des muscles, les masses d’ombre & de lumiere. C’est ce que l’on nomme mettre ensemble ou au trait une figure, comme on voit la Pl. XIV. Alors il sinira son dessein, c’est-à-dire qu’il l’ombrera, comme nous avons dit ci dessus en observant la comparaison des ombres, avec les demi-teintes & les réflets du dessein original. Il faut commencer par établir légérement toutes les masses d’ombre, afin de pouvoir les porter petit-à-petit au ton de celles de son exemple, en se réservant pour la fin de donner les forces & les touches les plus vigoureuses; ménager les réflets, fortifier les endroits qui n’en reçoivent point, & bien faire attention aux demi-teintes qui lient les lumieres aux ombres d’une maniere insensible, & empêchent les ombres de trancher; enfin suivre de point en point ce qu’on a sous les yeux; car copier un dessein, c’est l’imiter de telle maniere, que l’on puisse prendre la copie pour l’original. Il faut s’exercer à plusieurs reprises sur différens desseins de têtes, piés, mains, académies, figures de femmes, enfans, figures drapées; voyez les Planches depuis la onzieme jusqu’à la vingt-huitieme, & on dessinera indifféremment, soit au crayon de sanguine ou de pierre noire sur du papier blanc, soit au crayon noir & blanc sur du papier de demi-teinte, comme gris, bleu, ou couleur de chair tendre, que l’on fabrique exprès pour les Dessinateurs.

Toutes ces manieres de dessiner reviennent au même; si, par exemple, on dessinesur du papier de demi-teinte, le ton du papier formera naturellement les demi-teintes, & l’on rehaussera les lumieres avec le crayon blanc. Par conséquent on chargera moins son dessein de crayon de sanguine, ou de pierre noire pour former les ombres. Au lieu que, lorsque l’on dessine sur le papier blanc, les plus fortes lumieres sont formées par le papier même, on est obligé de faire les demi-teintes avec le crayon de couleur, & on charge les ombres à proportion, suivant son original.

Par l’étude que nous venons de prescrire; l’éleve acquérera ce coup-d’œil juste, cette habitude & cette facilité à manier le crayon, que l’on nomme pratique, qui doivent être le principal objet du tems qu’il y employera, s’il veut faire quelque progrès dans l’art: par-là il sera en état de dessiner d’après la bosse, pour se préparer à dessiner d’après la nature.

Dessein d’après la bosse.

Dans cette étude l’attention devient encore plus né-

cessaire, & les difficultés qu’éprouve l’éleve, deviennent plus grandes. Il faut qu’il raisonne ce qu’il a fait, ce qu’il va faire & ce qu’il va voir, d’après ce qu’il a vu dans les desseins des maîtres qu’il vient de copier; il faut qu’il connoisse les os par leurs noms, par leurs formes & leurs articulations; qu’il connoisse les muscles qui les enveloppent, leur origine, leur insertion, leurs fonctions & leurs formes, afin de pouvoir y donner le caractere & la vraissemblance qui conviennent au mouvement d’une figure; c’est l’étude de l’Anatomie qui doit le guider maintenant. Nous renvoyons à nos Planches anatomiques, Pl. I. II. III. IV. V. XI. XII. nous les croyons plus que suffisantes pour ce qui regarde le dessein, & nous n’avons pas jugé à propos de les répéter ici, afin d’éviter un double emploi.

Il faut que l’éleve étudie le squelette & le dessine de différens côtés, voyez Pl. I. II. III. Il étudiera pareillement l’écorché, & le dessinera de tous les côtés, voyez Pl. IV. V. VI. XI. & XII. Le fruit qui résultera de cette étude, le conduira à dessiner d’après la bosse & d’après nature avec discernement, & à donner à ce qu’il fera un caractere vraissemblable.

Les figures antiques que nous possedons, telles que l’Hercule Farnese, l’Antinous, l’Apollon, la Vénus de Médicis, le Laocoon, le Torse, voyez Pl. XXXIV. XXXV. XXXVI. XXXVII. & XXXVIII. Tant d’autres offrent aux artistes les moyens de connoître les belles formes & l’élégance des proportions. Ces chef d’oeuvres de l’art sont précieux; leurs célebres auteurs ont, en les formant, corrigé les défauts de la nature commune, & par le beau choix dont elles sont, l’on peut dire qu’elles rassemblent chacune relativement à ce qu’elles représentent, tout le caractere, toute l’élegance & toutes les graces, qu’il est presque impossible de trouver réunies dans un même sujet animé.

Avant que de les dessiner en entier, on en dessinera les parties séparément, comme têtes, piés & mains; on fera ensuite toute la figure; pour mettre ensemble, on s’y prendra, comme nous l’avons dit des académies, & on ombrera en suivant exactement l’effet du modele, & en comparant les masses d’ombre aux réflets & aux demi-teintes. Le but de cette étude est de préparer l’éleve à dessiner d’après nature, & de lui faire connoître les belles proportions & les belles formes.

On dessine d’après la bosse au jour ou à la lampe avec tel crayon, ou sur tel papier que l’on juge à propos, ainsi que d’après nature.

L’éleve, avant que dessiner d’après nature, étudiera aussi la perspective; mais comme nous n’avons pas jugé à propos de traiter cette matiere ici, il aura recours à cette partie dont il trouvera les principes dans le discours de l’Ouvrage auquel ce recueil est destiné, & parmi les Planches de Mathématique que nous publierons incessamment.

Dessein d’après nature.

C’est ici le lieu de faire la récapitulation des connoissances que l’éleve a acquises, en étudiant la Perspective, l’Anatomie & l’Antique, afin d’en faire une application raisonnable.

1°. Par rapport à la perspective: pour s’assurer des plans des figures en général, & surtout de celles où il se trouve des racourcis, voyez Pl. XVII. XVIII. & XIX. La moindre négligence sur cet article peut détruire toute la proportion, & rendre les mouvemens tout-à-fait impossibles. Pour saisir & faire passer à propos un contour sur un autre, afin de chasser la partie qui fuit, intelligence sans laquelle l’ensemble sera faux, & avec l’effet le mieux entendu, les lumieres, les ombres les mieux observées, une figure paroîtra toujours ridicule, & n’aura pas l’action que l’on se proposoit. Il en est de même pour les groupes de plusieurs figures. Voyez Pl. XIX. où les plans sont indiqués par les lignes A, B, C, D. A l’égard du fini ou de l’effet, c’est la même science qui détermine en général le degré de force des ombres sur les premiers plans, & leur affoiblissement à mesure que les corps qui les produisent s’éloignent. Les