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prendre un milieu entre ces deux extrêmes. Lorsque la main familiere avec les préceptes est parvenue à un certain point de perfection, elle peut accélérer ses mouvemens par degré, & acquerir cette grande liberté que l’on demande à ceux qui se destinent à occuper des emplois.

PLANCHE VII.
De la hauteur, largeur, & pente des écritures.

Il n’est aucun art qui ne soit assujetti à des regles & à des proportions que le bon goût a fait éclore & que l’usage a consacrées. Celui de l’écriture en a de moins compliquées que les autres; tout s’y mesure par corps & par becs de plume, & c’est de la précision & de la justesse que dépend la régularité des caracteres. Pour que ces principes ne se confondent point dans l’esprit du lecteur qui veut les mettre en pratique, je vais les expliquer séparément & le plus clairement qu’il me sera possible.

Sur la ronde.

La ronde porte quatre becs de plume d’élevation; elle a le défaut d’être maigre lorsqu’on l’écrit plus longue, & d’être trop pesante lorsqu’on l’écrit plus courte. La démonstration A, qui annonce cette élevation, fait voir l’aplomb mesuré à côté sur les quatre becs de plume. Ces quatre becs joints ensemble, font ce que les Ecrivains appellent un corps de hauteur en ronde. Le bec de la plume n’est autre chose en tout genre d’écriture, que la production en quarré de l’extrémité de la plume, comme il le paroît au chiffre 5. On sent assez que plus la plume est grosse, plus le quarré que son bec produit est fort, ainsi il diminue ou il augmente à proportion du plus ou du moins de grosseur qu’il possede.

La ronde est droite, c’est-à dire qu’elle n’incline d’aucun côté. La démonstration B fait voir la ligne perpendiculaire depuis 1. jusqu’à 2. qui traverse l’à-plomb & le coupe en parties égales. Les lignes obliques D B E prouvent que l’à-plomb est juste dans sa direction, & qu’il ne penche ni de gauche à droite, ni de droite à gauche. Tel est le caractere françois qui tient encore par sa droiture à l’écriture gothique moderne, d’où il tire son origine.

Enfin la ronde a une largeur égale à sa hauteur, parce qu’elle est quarrée. La démonstration C le présente. On voit par deux à-plombs éloignés suivant l’art, & mesurés au-dessus, que quatre becs de plume forment toute sa largeur. Au-dessous on remarquera que la distance entre deux jambages est toujours de deux travers de bec.

Sur la batarde & la coulée.

La batarde porte sept becs de plume d’élevation. On peut voir cette mesure à la démonstration A, où ces becs sont marqués à côté de l’à-plomb.

La pente de cette écriture est de trois becs de plume relativement à la perpendiculaire. En regardant la démonstration B ce principe se développe aisément. On voit d’abord la ligne perpendiculaire depuis 1. jusqu’à 2. ensuite l’à-plomb qui s’éloigne de cette ligne par son sommet de trois becs, & qui s’en rapproche dans sa base par le secours de la pente jusqu’à toucher la même perpendiculaire par l’angle du pouce.

Enfin la batarde a de largeur cinq becs de plume pris en-dehors. La démonstration C fait connoître cette largeur par les cinq becs exprimés au-dessus des deux jambages. Au-dessous est marqué la largeur qui doit être entre chaque à-plomb, & cette largeur est de trois becs.

Il est à-propos de faire remarquer ici qu’il y a une différence de corps entre la ronde & la batarde. En ronde un corps de hauteur est égal à celui de largeur, parce que l’un & l’autre ont quatre becs de plume, ce qui est différent dans la batarde. Comme dans celle-ci le corps de hauteur est plus grand que celui de largeur, il faut toujours distinguer dans cette écriture si c’est un corps de hauteur ou un corps de largeur.

Tout ce que j’ai dit pour la batarde peut servir pour la coulée, qui a les mêmes proportions. On peut aussi exécuter cette derniere sur six becs de plume de hauteur, & quatre & demi de largeur.

De l’O rond.

L’O rond peut se démontrer par deux principes: par le quarré & par le cercle. Je me dispenserai de parler de

la premiere figure, étant plus facile par la seconde de parvenir à la formation de cette lettre, à laquelle on est déja préparé par les deux parties courbes radicales de la planche précédente, qu’il ne s’agit que d’unir pour qu’elle se trouve parfaite. J’éclaircis cette exposition en décrivant la conduite que les doigts doivent tenir pour former cette lettre que je conviens être de difficile exécution, & qui pourtant n’a que deux mouvemens aussi naturels que faciles. Plier les doigts en descendant la premiere partie courbe qui commence par le trait délié 1. de droite à gauche; allonger les doigts en remontant la deuxieme partie courbe qui semble commencer en-dessous & au trait délié 2. pour terminer en arrondissant par un plein, dont les angles sensibles viennent se reposer sur le premier délié. Voilà tout. Que l’on jette les yeux sur la démonstration de cet O, on trouvera qu’il est rendu d’abord à la figure A par un cercle tout simple; à la figure B par son plein & ses mesures; que deux déliés & deux pleins le composent; que les deux déliés ont chacun un travers de bec; que l’O est fait sans interruption en soutenant avec soin la situation de la plume; enfin que cet O doit finir un peu en pointe & au milieu de sa largeur, comme la ligne perpendiculaire 3. & 4. le fait voir.
De l’O batarde & coulée.

L’O batarde de même que l’O rond, peut aussi se démontrer par deux principes; celui du parallélograme & celui de l’ovale. Je m’arrête au dernier, parce qu’il se rapproche des deux lignes courbes radicales. Les deux mouvemens employés pour l’O rond font le même office pour l’O batarde, qui doit être un ovale parfait; l’écrivain dans cette figure doit faire avec la plume ce que le mathématicien fait avec le compas. Suivant la démonstration on trouve à la figure A un ovale simple qui prépare pour la figure B où l’O est en plein & dans sa justesse. Pour l’exécution on plie les doigts en descendant la premiere partie courbe qui prend sa naissance au trait délié 1. de droite à gauche. On allonge les doigts en remontant la deuxieme partie, dont l’origine est en-dessous & au trait délié 2. pour achever en arrondissant de maniere que le plein se termine sur le premier délié & au milieu de la largeur de la lettre, comme la ligne oblique 3. & 4. le fait voir sans qu’on puisse trouver le point de la jonction. Cet O a deux déliés & deux pleins; chaque délié n’a qu’un travers de bec. Il faut maintenir dans cette lettre la situation de la plume, qui est, comme je l’ai dit aux observations de la planche 5. moins oblique que dans la ronde, c’est ce qui fait que l’O en batarde ne finit pas par un plein positif, mais par un plein qui se perd insensiblement à mesure qu’il approche au premier délié auquel il se joint.

Sur la forme.

La belle forme de l’écriture dépend de l’exacte observation des regles & d’un travail suivi. C’est par les gros caracteres & par la connoissance parfaite des angles de la plume, qu’elle s’acquiert; cette connoissance doit être tellement familiere à l’écrivain, que sans recherche & à l’instant il puisse représenter avec sa plume toutes les situations qui sont requises par l’art.

Je dois dire encore à l’égard de la forme, qu’il faut qu’elle soit bien sure avant de passer aux écritures expédiées, car si elle peche par l exactitude dans les caracteres réguliers, ce défaut deviendra bien plus grand dans les écritures faites avec promptitude.

PLANCHE VIII.
Des exercices préparatoires.

Lorsque l’on est instruit des premiers élémens de l’art d’écrire, on doit passer aux exercices préparatoires qui se font avec la plume grosse. J’appelle ces exercices préparatoires, parce qu’ils conduisent à la formation de tous les caracteres. Ceux que la planche VIIIe. présente sans être trop compliqués, ont la propriété de donner plus de fléxibilité aux jointures des doigts, & d’insinuer de la légéreté à l’avant-bras. On sent par ces raisons que ces exercices sont absolument nécessaires, & qu’ils doivent précéder & suivre le travail des lettres tant mineures que majeures. Pour arriver à leur exécution, on