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CONJECTURE
Sur le moyen de transporter sur toile les tableaux
peints sur bois.

M. Picaud a enlevé de dessus le paneau un tableau de Raphaël & un d’André del Sarre, & les a transportés sur toile. Les planches sur lesquelles ces tableaux avoient été peints, ont éte exposées aux regards du public. Peut être cette opération dépend-elle mains d’un secret difficile à trouver, que de beaucoup d’adresse & de patience. On n’ignore pas que les paneaux destinés à recevoir un sujet peint, étoient d’abord imprimés de plusieurs couches de détrempe, & que par conséquent c’étoient ces couches de détrempe qui tenoient collée la peinture au paneau. Si donc on fixe sur la peinture à l’huile une toile avec une forte colle, & qu’ensuite on parvienne à humecter un petit coin de la détrempe qui est sous cette peinture, on enlèvera une petite partie du tableau que l’on roulera : on pourra s’aider aussi d’un instrument à lame mince & tranchane : on continuera d’humecter successivement la détrempe & de rouler la partie de tableau qui s’en sera détachée, jusqu’à ce qu’enfin, & aprè un long travail, on ait détaché tout le tableau de dessus la planche. Il ne s’agira plus que d’en coller le revers sur une toile neuve, avec de la colle très-forte ou du marouffle, & l’on décolera ensuite la toile qui en contre la surface.

On parviendra de même à transporter sur toile une peinture à l’huile faite sur le mur. Il faudra scier avec grand son une partie médiocrement étendue de la muraille peinte, coller une toile sur la peinture avec une colle bien tenace ; user avec précaution, & sans exciter aucun éclat, l’épaisseur de la muraille, & quand elle sera devenue très-mince, établir tout autour un rempart de cire ; alors on jettera dessus un acide qui décomposera la pierre calcaire, & l’on observera bien le moment où cet acide sera près de toucher à la peinture, pour se hâter de l’enlever & de verser à la place de l’eau claire. Il ne s’agira plus que de mettre sur toile la peinture détachée de la muraille, & l’on suivra à cet égard le même procédé que pour la peinture détachée d’un pineau. Comme on auroit été obligé de scier par parties une grande composition, on rajusteroit avec soin ces parties sur la toile, & un peintre habile répareroit les jointures. Peut-être ne seroit-il pas nécessaire d’établir un rempart autour de la peinture, & de couvrir la pierre d’une certaine épaisseur d’acide : il pourroit bien suffire d’humecter doucement la pierre calcaire avec un linge trempé dans l’acide. De cette maniere on seroit plus maître de son opération, parce qu’elle se feroit avec plus de lenteur. Nous avons supposé que la peinture


étoit sur la pierre ; mais si elle étoit sur un enduit de plâtre, comme il arrive plus ordinairement, le succès seroit plus facile. L’enduit de plâtre représente assez bien les couches en détrempe de l’impression des peintures sur paneaux.

M. de Montamy ne conseille que l’eau tiede pour détacher une vieille toile de la peinture à l’huile qui y d’adhérente. L’opération ne seroit-elle pas plus facile & plus prompte si l’on employoit l’eau forte ou seconde ? Je crois qu’avec beaucoup de prudence & d’attention, on l’empêcheroit d’attaquer la peinture ; mais il faudroit se hâter d’avoir recours à l’eau pure, aussitôt que la toile commenceroit à le détruire.

On pourroit changer en certitude les conjectures que je hasarde, en prenant pour essais de mauvais ouvrages peints à l’huile sur toile, sur paneau & sur muraille. Toutes faciles que seroient ces expériences, si on les faisoit en petit, le temps ne me permet pas de les tenter. Il y a bien des années que j’avois formé cette conjecture, & j’aurois pu la vérifier ; mais d’autres objets l’avoient éloignée de ma pensée.

Je doute que l’un puisse trouver aucun moyen de sauver une peinture à fresque, en la détachant de mur sur lequel elle a été faite, parce qu’elle est intimement adhérente à l’enduit, qu’elle l’a pénétré, & ne fait plus avec lui qu’un même corps.

TORCHE-PINCEAU. (subst. comp. masc.) Vieux linge dont les peintres essuyent leurs pinceaux,

TOURET. (subst. masc.) Sorte de petit tour à l’usage des graveurs en pierres fines. L’arbre du touret porte les bouteroles qui usent, au moyen de la poudre de diamant ou d’émeril mêlée d’huile, dont elles sont enduites, la partie de la pierre qu’on leur présente. Le mouvement est communiqué à l’arbre du touret par une grande roue de bois placée sous l’établi, & par une corde sans fin, qui passe sous cette roue & la poulie de l’axe. La grande roue se meut par le moyen d’une marche ou pédale sur laquelle l’ouvrier pose le pied.

TOURNESOL. (subst. masc.) On appelle bleu de tournesol un suc exprimé de la plante qui, dans le systême de Tournefort, est la premiere & la principale espece des ricinoïdes. Cette couleur peut être d’usage dans la détrempe, le lavis & l’enluminure. Il seroit fort inutile de détailler ici les procédés par lesquels, dans un village nommé Galargue, distant de quatre à cinq lieues de Montpellier, plus de mille paysans sont occupés, dans la saison, à extraire le suc de l’héliotrope, qu’ils appellent maurelle, & à en teindre des chiffons pour faite ce qu’on appelle l’héliotrope en drapeaux : Ce drapeaux deviennent


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