Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/425

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
VAR VAR 415

vent pour une famille : mais où le sang est mêlé & les races croisées, les airs de tête sont variés à l’infini. Les fréquens changemens de la température de l’air concourent aussi au même effet, disent les physiciens. »

« Pour faire la comparaison des variétés de la nature avec la prétendue stérilité de l’art, Pline auroit dû envisager les deux objets sous les points de vue que j’ai marqués : il auroit dû sur-tout ne pas confondre l’art avec l’insuffisance ou la pratique maniérée de certains articles, à qui l’on reproche de donner à toutes les têtes qu’ils produisent un air de famille. L’antiquité a eu, comme nous, de ces articles dont la stérilité ne doit pas être rejettée sur l’art, mais sur leur paresse, qui les engageoit à suivre une routine facile, au lieu de consulter la nature, ou sur le goût qu’ils avoient pris pour certains modèles qu’ils copioient & recopiaient toujours. Si les conseils que Socrate donnoit à Parrhasius étoient justes, & ils l’étoient sans doute, l’art peut varier à l’infini les portraits, les caractères, les expressions, les figures, les physionomies. »

Il est démontré par ce passage de M. Falconet, que l’art peut être aussi varié que la nature : En effet s’il est capable d’en copier routes les productions, il est capable de ne se ressembler jamais.

Mais si l’art peut imiter toutes les variétés de la nature, doit-il les imiter toutes ? C’est ce que l’on peut nier, au moins pour la peinture d’histoire & pour la sculpture : comme dans ces genres, son objet est l’imitation de la belle nature, il ne peut l’imiter lorsqu’elle se varie par différens caractères de laideur & de défectuosité. Voilà donc une grande abondance dont il se prive. Mais comme ses ouvrages sont bien moins nombreux que ceux de la nature, il peut encore montrer la plus grande variété, en n’imitant chez elle que ce qu’elle a de beau dans ses productions.

La variété se trouve même dans les têtes des statues antiques : si elles ont entre elles, comme le dit M. Falconet, une certaine ressemblance, c’est celle que leur donne le style de la grande beauté : mais cependant elles diffèrent assez les unes des autres pour qu’on ne puisse les confondre mutuellement. Si l’on trouve entre plusieurs têtes antiques une ressemblance réelle, c’est entre celles qui représentent la même divinité ; car chaque divinité avoit un caractère de tête convenu : c’étoit vraisemblablement celui que lui avoir imprimé quelqu’article dans une statue devenue célèbre. La tête de cette statue devenoit le prototype de toutes les têtes de cette divinité.

La variété que l’article doit mettre dans le choix de ses figures, doit se trouver aussi dans les attitudes, dans les ajustemens, dans les ordonnances & dans tous les accessoires.

Le peintre qui se livre à l’imitation de la vie commune, & au genre qu’on nomme bambochade, trouve dans la nature des sources de variété encore bien plus abondantes que celles qui sont ouvertes au statuaire & au peintre d’histoire. Comme il n’est point astreint à ne choisir les formes qu’entre celles qui s’élèvent jusqu’au caractère de la haute beauté ; comme il peut même se permettre de représenter la laideur ; comme il ne s’interdit pas les expressions communes, triviales, baffes ; il peut mettre dans les ouvrages une diversité sans bornes. C’est un devoir rigoureux pour lui non seulement de ne pas admettre de ressemblance dans ses ouvrages, mais de ne s’en permettre même pas l’apparence.

Si la variété est un devoir pour l’article dans les objets qu’il représente, on peut ajouter qu’il doit aussi varier les travaux qu’il employe pour rendre ces différens objets. Cette variété est une expression du sentiment ; car si des objets divers excitent dans l’ame de l’artiste des sensations diverses, il rendra par des travaux variés la variété de ses sensations. Il ne traitera pas du même pinceau, de la même touche, les chairs de Vénus, & celles de Vulcain, l’embonpoint de la jeunesse & la sécheresse de la décrépitude, l’eclat des étoffes de foie, & la grossièreté de la bure, la mollesse du duvet & la dureté du fer. La monotonie de manœuvre indique l’absence de sentiment dans celui qui opère. Si le sentiment l’animoit, sa main suivroit naturellement les impressions de son ame, & se varieroit comme elles. Écrire tout du même style, peindre tout de la même touche, c’est la preuve d’une ame froide, que rien ne tire de l’apathie. (L.)

VÉRITÉ. (subst. sem.) L’objet de l’art n’est pas la vérité elle-même, mais l’apparence de la vérité. Pour offrir cette apparence, il est obligé de recourir à des moyens de convention ; c’est à-dire qu’il est forcé de se permettre des mensonges, que les spectateurs conviennent de recevoir comme des vérités, & sans cette convention, l’art n’existeroit pas. C’est, par exemple, une convention de la part du spectateur avec le statuaire, d’admettre, comme ayant de la vérité, une figure qui représente un personnage humain, & que cependant il voit bien n’être que de marbre ou de bronze, La forte de vérité que renifle se propose, ne va donc pas jusqu’à produire l’illusion. Voyez les article, Convention, Illusion, Peinture. (L.)

VÊTEMENT (subst. masc.). L’objet de Winckelmann en traitant du vêtement des anciens, dans son histoire de l’art, a été de