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Louis XV, érigée au milieu, de la place qui porte le nom de ce Prince. Le cheval est un chef d’œuvre, le plus beau, le plus pur que l’ont eût peut-être produit en ce genre, & à qui il ne manque que d’être antique pour recevoir tous les éloges qu’il mérite. Le modèle étoit encore plus beau ; mais des accidens arrivés à la fonte, ont forcé d’en altérer les finesses. Les Vertus qui soutiennent le pied-d’estal ne sont pas de Bouchardon : la mort ne lui a pas même permis d’en terminer les modèles en plâtre ; elles sont l’ouvrage de Pigalle.

Bouchardon étoit regardé comme le meilleur dessinateur de son temps & traitoit avec la même facilité, la même pureté, le grand le petit. On a de beaux monumens de son habilité en ce dernier genre dans les dessins des pierres gravées qui accompagnent le traité di. M. Mariette. Fessard, le Comte de Caylus, Preysler, Soubeyran, ont gravé d’après lui des dessins représentant des sujets de l’antiquité généralement traités dans la manière du bas-relief. Ses cris de Paris sont précieux par leur simplicité naïve & leur justesse.

La sagesse & la pureté caractérisent le talent de cet artiste, qui est mort en 1762, âgé de soixante & quatre ans.

(55) LAMBERT-SIGISBERT ADAM, né à Nancy en 1700, étoit fils d’un sculpteur qui lui donna les premières leçons de l’art. Il vint à Paris se perfectionner sous les plus habiles maîtres, remporta le premier prix de l’académie royale, & alla à Rome avec la pension, à l’âge de vingt-trois ans.

Il passa dix années dans cette ville à étudier & copier l’antique. Il restaura les douze statues de marbre qui représentent l’histoire d’Achille, reconnu par Ulysse, qui venoient d’être déterrées sous les ruines du palais de Marius, & dont le Cardinal dePolignac avoit fait l’acquisition. La plupart de ces figures étoient mutilées ; les unes n’avoient point de têtes, à d’autres manquoit la moitié du corps : on prétend qu’il est presque impossible de distinguer les parties antiques des parties restaurées. Si cela est vrai, on peut se plaindre de l’artiste qui savoit si bien imiter l’antique dans ses restaurations, & qui en différoit tant dans ses ouvrages originaux. On auroit pu dire de lui en changeant un peu le mot de Mignard : « Qu’il fasse toujours des antiques & non des Adam. »

Son talent de restaurateur fut souvent employé pendant son séjour à Rome. Il copia aussi dans cette ville un grouppe de marbre, de six pieds de proportion, réprésentant Mars caressé par l’Amour. On assure que les Romains ne purentrefuser d’applaudir au bas-relief dont il décora une chapelle de Saint-Jean de Latran & qui représente l’apparition de la Vierge à


Saint André Corcini. Des entreprises plus considérables alloient récompenser ce premier succès lorsqu’il fut rappellé par le ministere de France.

A son retour, il décora le haut de la cascade de Saint Cloud des deux figures estimées qui représentent la Seine & la Marne. Elles sont collossales & ont dix-huit pieds de proportion.

Il fut ensuite chargé de faire pour le roi deux grouppes qui étoient destinés au jardin de Choisy. Il réussit au gré du public qui trouve beau tout ce qui l’étonne : il fut moins applaudi des connoisseurs qui croyent que le beau doit être toujours accompagné de la simplicité. Ces deux grouppes représentent la chasse & la pêche. L’auteur y a mis tout son art à soigner les accessoires, & a été moins heureux dans la manière dont il a traité les objets principaux. Le premier grouppe est composé de Diane accompagnée de deux nymphes. L’une attache un héron à un arbre ; l’autre assise à ses pieds, lui tend un arc & un carquois pour en faire un trophée. Les feuilles & les branches de l’arbre sont travaillées à jour ; les plumes du héron sont finies avec le soin le plus recherché : quelques unes de ces plumes se détachent & semblent avoir, en marbre, la légéreté de la nature. Voilà ce qu’aime le vulgaire : mais les meilleurs juges prononcent que ces triomphes de la patience & d’une adresse mesquine ne sont pas ceux de l’art du sculpteur qui, à la beauté, doit joindre la solidité. Ils auroient voulu que l’auteur eût un peu négligé les feuilles de son arbre, le plumage de son oiseau, & qu’il eût fait Diane plus belle.

Les mêmes recherches sont encore plus exagérées dans l’autre grouppe qui représente deux nymphes occupées de la pêche. L’une tire un filet percé à jour & rempli de poissons qui semblent s’agiter. Un jeune triton est pris avec eux & fait des efforts pour échapper : l’autre nymphe aide sa compagne : le vent agite & fait voltiger les draperies de ces deux figures. Louis XV a fait présent de ces grouppes au roi de Prusse, & ils sont placés au jardin de Sans-souci, près de Potsdam.

On trouve la même finesse de travail dans le grouppe qu’Adam fit pour le jardin de Groois qui appartenoit au Duc d’Antin : il représente un chasseur prenant dans ses filets un lion qui a tué son chien. Bouchardon fit le grouppe correspondant, & comme il se montra plus grand & plus sage, il fut moins applaudi.

C’est Adam qui a fait à Versailles le grouppe de Neptune & d’Amphitrite pour le bassin de Neptune. On voit de lui, à l’hôtel de Soubise, six figures en stuc ; la Poësie, la peinture, la Musique, la Justice, l’Histoire, la Renommée ; & aux Invalides, la figure de Saint-Jérôme,


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