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que des parties plus sublimes ; la foule des artistes commencera par sacrifier à ce goût, & finira par l’adopter. Voilà la cause de la dégradation de l’art. Les ouvrages se multiplieront plus que jamais, parce qu’ils n’auront pas besoin d’être préparés par la réflexion ; de leur nombre, naîtra la satiété, le dégoût, le mépris ; & voilà la cause de la ruine de l’art.

PRONEUR (subst. masc.) Ce mot se prend toujours en mauvaise part : on l’employe pour désigner ces sortes de gens qui se chargent de célébrer les talens médiocres, & de les opposer aux grands talens. Les prôneurs ne peuvent être que funestes aux arts : ils abbaissent ceux qui les honnorent ; ils élèvent ceux qui les dégradent.

Mais quelquefois le nom de prôneur est donné par les partisans du mauvais goût aux bons juges qui s’élèvent contre eux pour défendre un artiste estimable. Si, par exemple, tine école s’est longtemps écartée du grand & du beau, s’il paroît enfin au milieu d’elle un artiste dont la manière contrarie ce qu’on a longtemps admiré, ses rivaux & leurs partisans feront retentit contre lui la voix de l’envie & de l’ignorance, & ses justes admirateurs seront designés par le titre insultant deprôneurs. Il en est de ce mot comme de tous ceux qu’employent les gens de parti : pour en bien déterminer le sens, il faut connoî re le parti de ceux qui en sont usage. Les partisans du Dominiquin dévoient être qualifiés de prôneurs par la cabale napolitaine, ennemie de cet artiste : aux yeux des juges équitables, ils étoient les justes défenseurs d’un grand artiste. Eh ! ne se souvient-on pas encore d’avoir entendu traiter le Comte de Caylus de prôneur de l’antique ? C’étoit ainsi qu’on cherchoit à dégrader cet homme qu’un goût sûr, ou un heureux instinct rendit le bienfaiteur & le restaurateur de l’école Françoise. (L.)

PROPORTIONS (subst. fem. pas.) Les proportions sont dans une partie des arts, ce que rythme est dans les autres. Les proportions naissent des différentes relations de dimensions ou de tems des parties d’un tout entr’elles & avec le tout.

Les proportions dans la peinture & dans la Sculpture, sont établies sur les mesures observées & comparées.

Elles sont relatives à un objet considéré seul & à ce même objet comparé à d’autres. Elles sont encore relatives, dans la peinture, à l’éloignement où le peintre suppose l’objet qu’il imite ; c’est la perspective qui règle cette sorte de proportions.

La figure de l’homme, qui est l’objet le plus noble & le plus intéressant de la peinture,


a été le sujet des observations les plus exactes par rapport à ses proportions : en observant, en comparant & en mesurant un grand nombre d’individus, on a démêlé quelles proportions des parties de l’homme entr’elles & relativement au tout, constituent plus exactement sa perfection visible. Pour faire connoître ces proportions & pour leur donner une base fixe, c’est-à-dire, pour les mettre plus à l’abri des variations qu’éprouvent, selon les pays & les tems, les mesures dont on se sert, on a choisi certaines parties du corps lui-même pour mesures.

La tête, ou la face ont été celles que les artistes ont préferées.

On mesure donc, dans la peinture & dans la scuipture, toutes les dimensions de la figure humaine, par longueurs de têtes où longueurs de faces.

La mesure appellée tête est la longueur d’une ligne, tirée perpendiculairement du sommet de la tête au-dessous du menton.

La mesure appellée face, est une ligne perpendiculaire tirée de la sommité du front seulement au-dessous du menton.

On partage la tête en cinq divisions, comme je le dirai, & la face en quatre : comme ces divisions ne sont pas egales entr’elles, on se sert des plus petites pour mesurer les parties du corps & des membres qui forment de plus petites divisions.

Par exemple, on mesure quelques parties subdivisées du corps humain, par longueurs de nez ; cette longueur est une des divisions générales de la tête, comme je vais l’expliquer.

La tête entière est regardée Par les peintres, comme devant être ovale : ils divisent cet ovale par une ligne qui en partage la longueur en deux parties égales & la largeur par quatre lignes transversales parallèles. La première de ces lignes transversales partage l’ovale entier en deux parties égales : c’est sur cette ligne que se placent les yeux, & les deux coins de chaque œil doivent s’y trouver compris. La moitié de l’ovale qui se trouve au-dessus de cette première division, se partage en deux parties égales, par une ligne également transversale. La partie la plus haute qui commence au sommet de la tête, renferme tour ce qui est couvert de cheveux : la partie inférieure est occupée par le front & terminée, comme je l’ai dit, par cette ligne transversale sur laquelle se doivent trouver les yeux.

La moitié inférieure de la tête, c’est-à-dire, celle qui se trouve au-dessous de cette ligne, se partage encore en deux parties égales, par une ligne également transversale, & c’est la première de ces parties qui établit & fixe la longueur du nez. Enfin ce qui reste de la tête,