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» çoîs fe font formé un ftyle national, dont » ie goût ingénieux, & ce qu’ils appellent » efprit, font les qualités diftinflivcs-, qu’ils » ont ceffé de faire entrer dans leurs tableaux 3> des perfonnages Grecs, Egyptiens, Romains » ou barbares, ainfi que le Grand Pouflin leur » en avoit donné l’exemple, 8c qu’ils le font » bornés à peindre des figures françoiles, pour » repréfenter l’hiftoire de quelque peuple que B ce fût »,

Puifque , de l’aveu de Mcngs , nos figures ont un caraétère françois , nous n’avons pas imité Rubens qui a prononcé dans fes ouvrages, aufTi fortement qu’il foit poiïïble , & bien plus qu’Otto ^nius fon maître, le caraftère Flamand. La vérité eft que nos peintres ont cherché, comme le Cortone & : Carie Maratte, à meubler l«urs tableaux d’un grand nombre de figures, à les groupper de manière à fatter le fens de la vue , s’occupant bien plus à leur donner ces agrémens artificiel", que l’expreffion & la beauté, & que d’ailleurs ils leur ont prêté les manières de la Cour & du théâtre. Mais noire école change maintenant de principes , & fi elle continue de fuivre la route qu’elle commence à fe tracer, elle deviendra de toutes les écoles, la plus févère obfervatrice des convenances & des loix que s’étoient impofées les artiftes de l’ancienne Grèce. On rioit autrefois , quand un amateur qui voyoit jufle , le Comte de Caylus , indiqiioit aux artifles le chemin qu’ils dévoient fuivre ; plufieurs de nos peintres étonnent maintenant qu’ils y font entrés, ( L. )

PEINTURE, ( fubft. fem. ) Tout homme doit- être étonné à la vue d’une fuperficie platte, qui par le moyen des traits & : des couleurs , lui préfente des objets faillans ; s’il voit dans un tableau les chefs-d’œuvres de la nature, parés de leurs plus riantes couleurs. Se difpoîés de manière à furprendre, à enchanter fes fens, il eft ravi d’admiration -, mais fi les objets dont il a admiré la faillie, & : l’éclat enchanteur, parlent à fon ame , en lin offrant ou un être qu’il chérit, ou un fait qui Jui infpire le goût des plaifirs innocens , du courage & des vertus ; fi enfin le tableau excite en lui les plus belles palfions ; alors, il devient paflionné pour cet art qui établit un des points de fon bonheur dans l’état de fociété. Telle eft la définition, tels font les effets de la Peinture.

D’après ce court expofé , qu’on juge do ce qui fe paffe dans l’ame d’un peintre qui , devant à fa profefTion feule les momens vraiment heureux dont il a joui, fe difpofe à communiquer au public toutes fes idées fur ce qwe cet art a d’utile , de grand, & de fublime. . . Cependant il faut que les idées accumulées fe P E I

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partagent, qu’elles prennent de l’ordre, afin que le réfultat en foit l’aifi & goûté de tout leéleur.

Cicéron , dans fa harangue pour le Poè’te Archias, a dit , parlant des belles-lettres, a dit : « Elles nournjfmc la jeuneffi , elles récréent « les viellards , elles embelUffent la fituation » la plus- fortunée , elles offrent une afyle 6" » une grande confolation dans les perfécutions « & les malheurs ; les lettres plaifent à la maifon , ne nuifent point aux affaires ; elles » nous accompagnent le jour & la nuit , dans » les voyages , ^i la campagne ; & lorfque les » facultés de notre efprit ne nous donnent pas » de difpofition pour en acquérir la connoij- ^'> fan ce ou pour les goûter, nous devons cependant en faite le plus grand cas , & les » admirer , en voyant ceux qui les pofsèdent » en jouir d’une manière fi délicieufi i>. Rien n’eil plus applicable à H peinture que ce paffagc d’un des plus beaux génies de l’antiquité, & foit qu’on exerce notre art foie qu’on en fade l’objet de fon amufenient Sr de fa curiofité , on y rencontre d’abord tous ces avantages.

Cependant la peinture n’eft pas bornée aux feuls agrémens que procurou les belles-lettres. La décoration dont elle embellit nos maifons nos théâtres, nos palais Se nos temples occupe fans ceffe nos yeux d’une manière enchantereffe ; & cela fans recherche, fans études & fans fatigue. Celui qui poliède une belle peinture goûte un plalfir qu’il multiplie fans celfe , en le faifant partager tout entier à fes amis , à fes concitoyens. Les divers genres d’efprit trouvent un charme particulier dans les produélions de ce bel art. L’ame fen/îble eft touchée ou par l’exprefllon générale d’un fujet, ou par celle àes figures qui le compofent ; csliïi qui cfi : doué de mémoire fo plaît à y retrouver ce qu’il a retenu de la fable , de l’hiftoire & de l’étude de l’antiquité ; enfin l’ceil de la perfonne la plus légère, la moins favante , je dis même la plus groflière , fera arrâié & enfuite fixé par les formes & : les couleurs d’un beau tableau. ♦ Par un admirable effet de l’induftrie humaine la peinture foumef à nos regards toiit ce que" nous ofire l’univera. Son empire s’étend fur tous les fiécles & fur tous les pays, pour nous préfenter les faits anciens comme ceux dont nous fonimes témoins, les chofcs les plus éloignées comme celles que nous pofîïdons. En cela, ce bel art fupplée à il nature, qui ne nous rend vifibles que les objets préfens. La féduélion qu’il produit eft telle qu’on quitte cette maîtreîTe’du monde pour goûter leschar" ; mes de fa repréfentation , c’eft-à-dire d’un tableau fur lequel fon mouvement ordinaire & fa mobilité accidentelle foni fixés. Par notre