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on ne craint point de le comparer, en ce genre, aux plus célèbres maîtres de sa nation. Ses animaux sont très bien dessinés ; il ne le céde pas à Wouwermans pour la couleur ; sa touche est fine & son pinceau moelleux. Ses fonds sont agréables & ses ouvrages sont rendus piquans par l'intelligence du clair-obscur. Il est mort d'une maladie de langueur en 1654, n'ayant pas encore vingt-neuf ans accomplis. Il a laissé des eaux-fortes d'une pointe fine, spirituelle & badine.


(201) Jean Lingelbac, de l'école Allemaude, né à Francfort-sur-le-Mein en 1625, passa six ans à Rome, occupé à dessiner tous les objets intéressans qu'offrent les environs de cette ville. Les sujets les plus ordinaires de ses tableaux sont tantôt des ports de mer, dont il enrichissoit les devans de quelques édifices en partie ruinés, & qu'il animoit par un grand nombre de figures, & par l'agréable variété des costumes divers des nations qui fréquentent les ports tantôt des foires & des marchés remplis d'un peuple en action & dont les expressions sont d'une piquante vérité. Ses ciels sont vaporeux & aëriens, sa touche est fine, sa couleur d'un bon ton. On ignore en quelle année est mort cet artiste. Il gravoit à l'eau-forte.


(202) Jacques Lavecq, de l'école Hollandoise, né à Dordrecht en 1625, fut élève de Rembrandt, & imita ce maître d'une manière trompeuse. Il changea sa manière, & devenu lui-même, il se trouva fort inférieur à ce qu'il avoit été. Il se consacra au portrait. Pendant un séjour qu'il fit à Sédan, il fut mandé pour faire celui d'un vieil ecclésiastique, qui lui dit qu'autrefois il s'étoit fait peindre par un méchant peintre Flamand, & que dégoûté de ce pitoyable ouvrage, il l'avoit fait mettre au grenier. Lavecq témoigna quelque curiosité de voir cette peinture ; elle fut apportée, sècouée, essuyée ; quelle fut la surprise du peintre en reconnoissant un très bel ouvrage de Van Dyck. Il vit reporter ignominieusement le chef-d'œuvre au grenier, & fit lui-même le portrait qui fut placé dans la pièce la plus honorable de l'appartement. Cet artiste est mort à Dordrecht en 1655, à l'âge de trente ans.


(203) Samuel Van Hoogstraten, né à Dordrecht en 1627, reçut de son père les premiers principes de son art, & fut ensuite élève de Rembrandt, qu'il imita d'abord, & dont ensuite il quitta la manière. Il peignit le portrait, l'histoire, le paysage, la nature inanimée, & ne fut médiocre dans aucun genre. Il visita Rome, travailla à Vienne, & en Angleterre, & se fixa dans sa ville natale.


Son dessin ne manque pas absolument de correction, ses compositions sent ordonnées avec jugement, le temps n'a rien fait perdre à ses couleurs de leur première fraîcheur. Si l'on peut quelquefois lui reprocher des couleurs entières, il s'excusoit sur le mauvais goût des amateurs à qui elles plaisoient par leur éclat. Il étoit poëte & avoit de grandes connoissances. Entre plusieurs ouvrages littéraires qui l'ont fait connoître, on distingue son traité de peinture. Il est mort à Dordrecht en 1678, âgé de cinquante-un ans.

Jean Van Hoogstraten, frere de Samuel, passa pour avoir bien peint l'histoire ; il fut estime de l'empereur qui se l'attacha, & mourut jeune à Vienne, on ne sait en quelle année.


(204) Henri Verschuring, de l'école Hollandoise, né à Gorcum en 1627, fut élève de Jean Both, & passa ensuite en Italie. Il suivit à Rome les études du modèle à l'académie, & ne négligea pas d'étudier les restes précieux de l'art antique. Il porta la même assiduité de travail à Florence & à Venise. Il y fut employé dans le genre de l'histoire qu'il abandonna tout à coup pour celui des batailles. De retour dans sa patrie, il suivit en 1672. l'armée Hollandoise pour en dessiner toutes les opérations. Les batailles, les attaques de voleurs, les village, saccagés, sont les sujets auxquels il a le mieux réussi. Elevé à la dignité de bourguemestre, il n'abandonna point son art. Il périt à l'âge de cinquante-trois ans, en 1690, dans un voyage par eau, avec le navire qui le portoit.


(205) Carlo Cignani, de l'école Lombarde, né à Bologne en 1628, fut élève de l'Albane, & confondit souvent son pinceau avec celui de ce maître. Il eut une grande réputation & par conséquent des envieux, qui porterent leur méchanceté jusqu'à gâter plusieurs de ses tableaux. S'il avoit eu de la vanité, il auroit accepté les titres de comte & de chevalier qui lui furent offerts plusieurs fois par le Pape, par le duc François Farnese & par d'autres princes : mais il eut le noble orgueil de n'ambitioner que la qualité de grand artiste. Il dirigea long-temps l'académie de Bologne, & telle étoit la confiance que ce maître inspiroit, que l'académie le suivit à Forli, lorsqu'il y fut mandé peur peindre la coupole à laMadona del Fuoco, Ce fut dans cette ville qu'il mourut en 1719, à l'âge de quatre-vingt onze ans, & son corps fut exposé sous la coupole qui étoit regardée comme son chef d'œuvre, & qui lui avoit couté près de vingt ans de travail.

Cignani composoit bien & ordonnoit avec beaucoup de feu : on ne remarquoit pas le