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sur l’autorité des anciens, & les peintres peuvent les consacrer par leur art, sans crainte de manquer au costume.

Passons maintenant aux mariages des Romains. Ils se faisoient ordinairement par contrats : on prenoit en même temps les auspices, & l’on voyoit arriver à la fois les officiers publics chargés de recevoir & d’écrire les conventions matrimoniales, & les ministres de la religion, dont la fonction étoit de consulter les volontés des dieux.

Cette cérémonie répondoit à celle que nous appellons les fiançailles ; le fiancé, pour gage de ses promesses, faisoit à sa future épouse des présens qu’on appelloit des arrhes. Il y joignoit un anneau qu’elle portoit au quatrième doigt, parce qu’on croyoit que de ce doigt, partoit une veine qui se rendoit au cœur. Cet anneau étoit de fer au temps de Pline, quoique ce fût un siècle de luxe ; cette simplicité rappelloit à la mémoire l’ancienne pauvreté des Romains.

Il y avoit trois manières de contracter le mariage ; par l’usage, par la farine, par l’achat.

La première manière étoit une commémoration de l’enlévement des Sabines, & ressembloit à la violence. L’époux, accompagné de ses amis, fondoit en armes dans la maison paternelle de l’épouse, & sembloit l’arracher de force du sein de sa mère ou des bras de ses parens. Comme le rapt étoit concerté, elle avoit la précaution de se revêtir de ses plus belles parures, en attendant ses ravisseurs. Une année d’habitation de l’épouse dans la maison de l’époux, consacroit leur union.

Dans la célébration du mariage par la farine, qu’on appelloit confarréation, les deux époux, se tenant la main, & prononçant des paroles consacrées, mangeoient ensemble de la même farine qu’ils répandoient sur les victimes. Cette cérémonie exigoit la présence de dix témoins. Quelques savans pensent qu’elle étoit réservée aux mariages des Pontifes ; d’autres croyent seulement que les Pontifes devoient y présider. On voit par une tragédie, faussement attribuée à Sénèque, que le mariage de Néron & d’Octavie avoit été célébré par la confarréation ; mais comme les Empereurs étoient en même-temps Souverains Pontifes, ce passage ne lève pas la difficulté.

Les deux époux, dans le mariage par achat, sembloient s’acheter réciproquement. Varron parle seulement de la femme qui paroissoit acheter son mari, en lui donnant une de ces pièces de monnoie qu’on nommoit As ; mais le nom seul de Coëmption, témoigne que, dans cette formalité, l’achat étoit mutuel. Les deux contractans se demandoient, en se donnant la main,’s’ils vouloient s’accepter l’un pour époux, l’autre pour femme.


Le jour de la célébration, l’époux séparoit avec un fer de lance les cheveux de son épouse, soit pour lui témoigner qu’unie déformais à un homme de guerre, elle devoit renoncer aux soins trop recherchés de sa chevelure ; soit pour signifier que le fer pourroit seul rompre leur union. Après cette formalité, l’épouse mettoit sur sa tête une couronne de vervene ; elle se revêtoit d’une tunique simple, & ceignoit une ceinture de laine de brebis, ceinture virginale, que l’époux devoit dénouer.

Lorsqu’elle étoit conduite le soir à la maison de l’époux, elle avoit la tête couverte d’un voile jaune, qu’on appelloit flammeum, parce qu’il étoit de la couleur des flammes ; d’autres cependant disent qu’il étoit rouge, & qu’on le choisissoit de cette couleur, pour cacher le rouge de la pudeur, dont les joues de l’épouse se couvroient en cet instant. Sa chaussure étoit de la même couleur. Trois jeunes garçons la conduisoient ; il fallsoit qu’ils eussent encore leurs pères & leurs meres, & ils étoient vêtus de la robe prétexte. Deux d’entr’eux tenoient les mains de l’épouse, le troisième portoit un flambeau d’aubépine. Cinq autres flambeaux éclairoient le cortége. On portoit en pompe une quenouille chargée de laine, & un fuseau : un enfant tenoit, dans un vase couvert, les ustensiles nécessaires aux femmes.

Les portes de la maison où elle devoit être reçue, étoient ornées de verdure & de fleurs. A son arrivée, elle y attachoit des bandelettes, & les frottoit d’huile, ou, suivant Donat, de graisse de loup pour détourner les maléfices. On la portoit pour lui faire passer le seuil de la porte, soit parce qu’on auroit regardé comme un augure funeste ou qu’elle y eût touché, ou qu’elle l’eût franchi du pied gauche ; soit en mémoire de l’enlévement des Sabines qui furent portées malgré elles dans les maisons nuptiales. Dès qu’elle étoit entrée, on lui remettoit les clefs, pour l’avertir que la fortune de son époux étoit désormais confiée à ses soins & à son économie. Lui-même lui présentoit l’eau & le feu, les deux choses les plus nécessaires à la vie, & dont l’interdiction, prononcée par la loi, étoit regardée comme une peine de mort. Il lui signifioit, par ce symbole, qu’il partageoit sa vie avec elle.

L’époux donnoit ensuite à son épouse & à ceux qui l’avoient accompagnée, le repas nuptial ; ce repas étoit ordinairement très-somptueux. On y appelloit des joueurs de flûtes, & l’on y répétoit, dans des chansons, le nom de Thalassius, comme chez les Grecs celui d’Hyménée. Ce Thalassius étoit, dit-on, un Romain, pour qui, du temps de l’enlévement des Sabines, la nation avoit un grand respect. Des soldats qui lui étoient attachés enlevèrent