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ture actuelle. Ils citent continuellement, pour expliquer leurs idées, la pratique des peintres & des fculpteurs de leur temps , mais particulièrement celle de Phidias , fortifie favori de l’antiquité : & comme s’ils n’avoient pu exprimer arTez leur admiration pour ce génie extraordinaire , en difant funplement ce qu’ils favoient de les ouvrages , ils ont «u recours à l’enthoufiafme poétique , en appellant infpiration , don du ciel, la faculté de trouver la beauté idéale. Us fuppofent que l’artifle, pour remplir l’on efprit de l’idée parfaite du beau , s’eft élevé jufqu’aux régions éthérées. « Celui , ditProclus, » qui prend .pour modèles les formes de la » nature , & qui fe borne à les imiter exaclement, ne pourra jamais atteindre à la beauté » parfaite ; car les productions de la nature font » pleines d’imperfections , & par conféquent » loin de pouvoir iérvir de modèle de beauté. » Aufîi Phidias , lorlqu’il voulut produire fon n Jupiter, ne chercha- t-il point à copier quelque objet que la nature lui auroit préfenté , » mais il ne fuivit que l’image qu’il s’en étoit n formée d’après la defeription d’Homère ». Et Cicéron parlant auffi. de Phidias , dit : « que jo cet artifte , voulant faire la ftatue de Minerve » & de Jupiter , ne prit point pour modèle 03 quelque figure humaine -, mais que s’étant a formé dans Ton imagination une idée pluspars > faite de la beauté , il en faifoit conftamment _» l’objet de fes contemplations , & employait « tous fes efforts pour la produire de même au ■j> jour b.

Les ’modernes , continue M. Reynolds , ne ■font pas moins convaincus que l’étoient les .anciens de ce pouvoir fupérieur de l’art, & ne xonnoifl’ent pas moins fes effets. On trouve dans ^chaque langue des mots propres pour exprimer cette perfection : le gujlo grande des Italiens , le beau idéal des François , le gréât fly le , le genius Se le tafie des Anglois font différentes dénominations de la même choie. C’efr, difentïls, cette dignité intellectuelle qui ennoblit la peinture, qui fert à diftinguer cet art dufim--ple mécanilme , & qui produit aifément ces

grands effets auxquels l’éloquence & la poëfie

ne parviennent que difficilement par des efforts lents & repétés.

Ceft par l’étude & l’expérience que Partifte parvient à.créer ces grands effets., C’efl par l’expérience feule qu’il parvient à découvrir ce qui efl difforme dans la nature ; ou ,pour m’exprijner en d’autres termes , ce qui’^eft purement individuel & non idéal , de forte que toute la heaume & toute la grandeur de l’art confiftent , félon moi , à s’élever au deffus des formes individuelles , & à éviter les particularisés locales %c les petits détails de toute efpèce. Il n’y a •que celui qui , par une longue habitude d’obferver , elt parvenu à connaître ce que chaque I M I

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efpèce d’objets a en commun , qui puifle difcerner ce qui manque à chaque objet en particulier. Cette longue & pénible comparaifon doit être la première étude du peintre qui veut atteindre au plus grand ftyle. Par cette méthode, il acquiert une jufbe idée des belles formes , ; il corrige la nature par elle-même , & fe fert de ce qu’elle a de parfait pour cacher fes imperfections. Son œil étant en état de diftinguer, dans’ les objets, les difformités & les défauts accidentels de leurs formes naturelles, il conçoit , par abflraclion , une idée de formes plus parfaites que celles .qui lui font offertes parles originaus , &, ce qui peut fembler un paradoxe., il apprend à deffiner exactement, en ne faifanr. {’es figures femblables à aucun modèle exiftant» Cette ide’e de l’état parfait de la nature , auquel l’artifle donne le nom de beauté idéale, efl le grand principe fur lequel il faut s’appuyer pour produire des ouvrages de génie ; c’efl par ce principe que Phidias a mérité fa réputation , & que fes ouvrages’ ont excité l’admiration 8c l’enthoufiafme , & ce fera encore par ce principe que ceux, qui auront le courage de fuivre la même route , jobtiendronî .une pareille gloire.

C’en efl affez fur V.ïm’itatien de la nature , & fur la manière dont le grand artifte doit s’éloigner de la froide & fcrupuleufe imitation qui le rendroit un ftérile copifte de fes modèles. ; il efr temps de pafler à Yima.atieu des grands maîtres.

( Imitation des maîtres ).. Deux routes conduifent au bon goût ; l’une , plus difficile , confifle à faire choix dans la nature même de ce qui efl le plus utile & le plus beau ; l’autre , plus aifée, fe borne à étudier les .ouvrages au ce choix a déjà été fait.

U faut bien diflinguer dans un -tableau -que l’on prend pour objet de fon étude deux chofes très-différentes ; l’une efl lamanière du maître , qu’on peut comparer en quelque forte à l’accent de l’orateur ; l’autre efl le réfultat de la caufe qui l’a conduit dans fon travail , x ?efli-dire des principes qu’il s’eft formés. La plupart de ceux qui étudient les ouvrages .«rira maître , s’appliquent principalement à s’identifier fa manière. C’efl fe préparer de .bonne heure un moyen de n’être jamais foi -même & de refier le copifte d’un autre , même Jorfqu’on fera original. Ce font les maximes du maître qu’il faut étudier , pour pouvoir .employer ces mêmes maximes dans I’occafion. Sa l’on copie quelques parties d’un maître , xe doit être celles dont il a fait un choix particulier, celles auxquelles il s’eft particulièrement attaché par goût , par choix , par principe.

Remarque-t-on , dansles ouvrages tPutimaîtrt ?,, une partie de l’art quelquefois fupérieitrem«ït